À L’HEURE d’opérer un choix concernant l’orientation de leur carrière de rhumatologue, ils ont chacun suivi leurs aspirations professionnelles et personnelles, tout en tenant également compte de leur perception du devenir de la spécialité. Après des études à l’hôpital Cochin et un poste de chef de clinique à Lariboisière, Sophie Lahalle, installée en cabinet depuis un an, s’est associée avec une autre rhumatologue à Charenton-le-Pont, dans la périphérie sud-ouest de la capitale. Elle est spécialiste des pathologies de la main et de la maladie de Dupuytren. Si elle avoue avoir un temps esquissé « le projet d’embrasser une carrière universitaire », elle reconnaît que l’ampleur de la tâche et son risque d’empiétement sur la vie familiale lui ont fait suivre une autre voie. Un choix qu’elle ne regrette absolument pas puisque, la maturité aidant, elle explique « s’être rendue compte d’un besoin d’autonomie et de rapport différent avec les patients ».
Thomas Funck-Brentano a pour sa part opté pour une orientation 100 % hospitalière puisqu’il termine sa thèse après quatre ans de laboratoire et commence son clinicat en novembre de cette année à l’hôpital Lariboisière. À terme, son objectif avoué est le professorat, même s’il tempère rapidement cette aspiration en lui reconnaissant un caractère « très présomptueux ». Le fait est que pour celui qui « a toujours aimé comprendre comment ça marchait », le volet recherche fondamentale ou clinique est aussi important que celui de l’enseignement ou de la pratique médicale. Son idée est donc d’avoir « ce bagage scientifique supplémentaire que l’on n’a pas lorsque l’on suit des études standards », même si l’intéressé reconnaît qu’il est de plus en plus difficile de mener de front ces trois métiers en gardant un haut niveau dans chacun d’entre eux.
Et demain ?
Le sentiment du Dr Lahalle envers l’avenir de sa pratique est partagé entre inquiétudes et optimisme. Sa principale interrogation se situe au niveau « du regard que les tutelles portent sur la médecine libérale ». La question fondamentale pour elle pouvant se résumer à : « pourrais-je encore vivre de mon métier sans renier ma pratique ? » Elle accorde de fait une grande importance à sa « liberté de prescription et d’organisation » et avoue « ne pas avoir envie qu’un regard extérieur puisse décider de ses horaires de travail », alors même que cette autonomie participe en partie de son choix d’être praticienne libérale. Pour autant, Sophie Lahalle reste relativement optimiste sur ces questions tout en rappelant qu’elle ne s’est pas totalement séparée de l’hôpital auquel elle « reste attachée ». Elle pratique ainsi une demi-journée à l’hôpital Lariboisière ainsi que deux autres demi-journées à l’hôpital de la Croix Saint-Simon à Paris : « j’aime toujours le travail en équipe et la relation avec les autres rhumatologues, les radiologues et les chirurgiens ». L’idéal pour elle serait de « pouvoir garder ce système » alterné dans lequel elle se retrouve parfaitement et qui correspond au mieux à sa conception de sa pratique.
Cette volonté de décloisonnement entre la pratique de ville et la pratique hospitalière est également partagée par Thomas Funck-Brentano, pour qui l’issue éventuelle d’une installation en ville malgré ses aspirations actuelles « ne serait pas un échec ». Son sentiment est que « les médecins libéraux seront de plus en plus sollicités pour la recherche clinique, car les patients qu’ils voient ne sont pas les mêmes que ceux que nous traitons à l’hôpital ». Il rappelle à cet effet qu’il y a « de plus en plus de médecins libéraux qui sont à cheval entre la ville et l’hôpital et qui participent ainsi activement à la recherche » et appelle de ses vœux « des structures de formation communes ». Le fait qu’il n’existe à l’heure actuelle aucun stage chez un praticien de ville constitue pour lui « une aberration », d’autant que beaucoup de ces cabinets « ressemblent de plus en plus à des petits hôpitaux pourvus de plateaux techniques très complets ». Le développement du réseau ville/hôpital et la réorganisation du système lui semblent d’autant plus importants qu’il s’interroge sur l’avenir de la rhumatologie hospitalière au vu « de la tendance actuelle qui tend à voir le nombre de lits diminuer ». À ce rythme-là, la question est donc de savoir « quelle sera la place de la rhumatologie au sein des services de médecine et comment l’on fera pour former les futurs rhumatologues ».
D’après un entretien avec le Dr Sophie Lahalle et le Dr Funck-Brentano, Paris.
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