Aux États-Unis, on devient héroïnomane après une prescription médicale

Publié le 30/05/2014
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Crédit photo : AFP

Au cours des 50 dernières années, le profil des usagers d’héroïne répondant aux critères de dépendance listés dans le DSM IV, a changé. Plus de femmes, plus de Blancs, plus de classes moyennes et plus de glissement entre prescriptions médicales d’opioïdes et usage récréatif. Telles sont les conclusions d’une équipe américaine coordonnée par Theodore J. Cierco (département de psychiatrie, Washington) qui les publie dans la dernière version du « Jama Psychiatry ».

L’auteur a enquêté sur deux groupes d’usagers de drogue, l’un regroupant des patients déjà diagnostiqués selon les critères DSM IV (2 797), l’autre provenant d’entretiens structurés (54).

Plus âgés, plus urbains

Les héroïnomanes des années soixante étaient principalement des hommes, à 82,8 % et plutôt jeunes (16,5 ans). Les usagers récents, c’est-à-dire ceux qui ont commencé leur consommation au cours des dix dernières années, sont plus âgés (22,9 ans), vivent plus fréquemment dans les zones urbaines.

Le premier contact avec la substance c’est très souvent fait par une prescription médicale d’opioïdes forts à visée antalgique comme l’oxycodone commercialisée sous le nom d’Oxycontin. Dès lors, la perception de la substance est rassurante ; s’agissant d’un traitement, elle est reconnue comme « digne de confiance » et dotée d’effets « prévisibles ».

Trois quarts des toxicomanes de l’enquête ont basculé vers l’héroïne, moins chère et plus facile à se procurer qu’un opioïde sur prescription. Un des consommateurs interrogés s’explique clairement sur le sujet : « L’héroïne est moins chère, plus forte, l’approvisionnement est plus stable. C’est aussi plus facile à utiliser en intraveineux que les pilules ou autres, qu’il faut broyer. Et ça vous emmène plus loin que l’OxyContin. »

Les Blancs des villes

Dans les années soixante poursuit l’auteur, les consommateurs de drogues étaient recrutés dans les minorités ethniques. Aujourd’hui ce sont essentiellement des Blancs, à 90 %, hommes et femmes vivant loin des quartiers déshérités.

L’étude comporte forcément quelques biais reconnaissent les auteurs, ne serait-ce que par le fait que certains se procurent la drogue via internet.

The Changing face of heroin Use in United States . A retrospective Analysis of The Past 50 Years. Jama Psychiatry . doi :10.1001/Jama Psychiatry . 2014.366

Dr Anne Teyssédou

Source : lequotidiendumedecin.fr