Après le signalement fin avril de plusieurs cas groupés d’infections de bilharziose urinaire à Schistosoma haematobium, chez des personnes qui s’étaient baignées dans le même cours d’eau douce en Corse du Sud, la rivière Cavu, les autorités sanitaires, après avis du Haut Conseil de la santé publique (HCSP), publient de recommandations sur les modalités de dépistage et de confirmation du diagnostic des personnes exposées.
Consulter son médecin traitant
Dans son avis publié lundi, le HCSP recommande la réalisation d’un dépistage de la bilharziose chez toute personne ayant eu un contact cutané même bref avec de l’eau (baignade, trempage d’un membre, etc.) de cette rivière, entre 2011 et 2013 sur une période allant du 1er juin au 30 septembre. « Les personnes exposées devront consulter leur médecin traitant. Cela sans caractère d’urgence, puisque les complications ne surviennent qu’à long terme », précise le ministère le ministère de la Santé qui a mis en place un numéro vert d’information gratuit (0800.130.000). Des fiches mémo pour les professionnels de santé sont disponibles sur le site du ministère.
14 cas et 4 familles concernées
L’avis du HCSP tient compte du cycle de la maladie et du contexte épidémiologique. Les investigations orientent vers une transmission locale. Plusieurs épisodes de cas groupés ont été rapportés depuis avril 2014, soit 14 cas répartis en 4 groupes déclarés à Toulouse, Strasbourg et en Allemagne. L’interrogatoire de ces quatre familles a permis de mettre en évidence la fréquentation d’un même lieu de baignade : rivière Cavu à Sainte-Lucie de Porto-Vecchio, seule source commune d’exposition des cas identifiée à ce jour. Les analyses malacologiques ont mis en évidence la présence de bulins (Bulinus truncatus), le mollusque qui sert d’hôte intermédiaire, dans le Cavu. « Il semble s’être établi un cycle parasitaire récidivant chaque été au moins en 2011 et en 2013, à partir de personnes infectées vivant ou séjournant régulièrement en Corse », souligne le HCSP. La température de l’eau n’est pas favorable à l’instauration d’un cycle hivernal. « Du fait de la fréquentation élevée (touristique et professionnelle) du site pendant l’été, de la contagiosité importante de la bilharziose et de la forte proportion de formes asymptomatiques, il faut attendre plusieurs milliers de sujets infectés asymptomatiques », poursuit le Haut Conseil.
Difficultés du diagnostic
Le diagnostic et le traitement permettent de diminuer le risque de bilharziose urinaire symptomatique et de complications à long terme (infertilité, insuffisance rénale, néoplasie). Au niveau collectif, ils permettent d’interrompre le cycle de la maladie et de nouvelles contaminations.
Toutefois, le diagnostic clinique reste difficile du fait du caractère fruste, non spécifique des symptômes et de la fréquence des cas asymptomatiques (1 cas sur 3). Sont évocatrices : une hémospermie, une hématurie terminale, des cystites à répétitions, des douleurs sus-pubiennes, une pollakiurie, des lésions granulomateuses vulvaires récidivantes, une infertilité.
Les examens biologiques standards manquent également de sensibilité : recherche hématurie à la bandelette sur échantillon d’urines fraîches souvent négative, inconstance de l’hyperéosinophilie sanguine en phase chronique, normalité de la fonction rénale en dehors des formes très anciennes. La réalisation correcte de l’examen parasitologique des urines à la recherche d’œufs nécessite une certaine habitude et s’avère chronophage. La sérologie est l’examen de choix du diagnostic. Pour une sensibilité optimale, elle doit associer deux techniques (Elisa et hémagglutination) ainsi que l’utilisation de deux antigènes parasitaires de stades différents (œuf et parasite adulte).
Double sérologie
Le HCSP recommande donc de réaliser le dépistage en effectuant une double sérologie associant deux techniques différentes : Elisa/hémagglutination. Le test est positif si au moins une des deux techniques est positive. « Dans un premier temps, il n’y a pas lieu de réaliser une numération formule sanguine (NFS), un examen parasitologique des urines (EPU) ou une PCR », précise le HCSP. En cas de diagnostic positif (cas infecté), le bilan complémentaire nécessite l’évaluation de l’intégrité des voies urinaires (échographie des voies urinaires) ainsi que de la fonction rénale (créatininémie). Selon le contexte, le médecin pourra compléter son bilan par un EPU et une NFS. « Tout cas confirmé doit faire l’objet d’un signalement à l’agence régionale de santé (ARS) », poursuit le HCSP.
Traiter par le praziquantel tous les patients en cas de sérologie positive
Tous les patients ayant une sérologie positive devront être traités quels que soient le tableau clinique, le résultat de la bandelette urinaire, l’éosinophilie ou le résultat de l’examen parasitologique des urines. « Il n’existe en France qu’une seule molécule active sur les formes adultes de Schistosoma haematobium, le praziquantel », indique le HCSP. La posologie recommandée est de 40 mg/kg. Toutefois, le laboratoire Bayer qui le commercialise sous l’appellation de Biltricide (disponible sous forme de flacon de 6 comprimés de 600 mg, quadrisécables) a prévenu d’un risque de rupture de stock. « Au vu des consommations observées, le stock actuellement disponible permet de couvrir la période jusqu’au 1er juillet 2014 », relève le HCSP qui prévoit des mesures de contingentement et la possibilité d’importer une spécialité à base de praziquantel commercialisée par un autre laboratoire.
Il n’existe pas de recommandation spécifique concernant les posologies dans la population pédiatrique pour laquelle il n’existe pas de forme galénique spécifique. Le Biltricide est actuellement contre-indiqué chez la femme enceinte pendant le premier semestre mais le RCP (résumé des caractéristiques du produit) en cours d’actualisation devrait lever cette contre-indication, les données étant plutôt rassurantes. La période d’interruption de l’allaitement suite à la prise de praziquantel actuellement de 72 heures sera réduite à 24 heures post-administration. Un délai minimal d’au moins 8 semaines doit être respecté entre le bain exposant et le traitement afin d’améliorer l’efficacité thérapeutique et de diminuer le risque d’effet secondaire. Il est rappelé que le traitement des formes d’invasion repose sur le traitement anti-histaminique et la corticothérapie systémique en cas d’atteinte sévère. Le traitement anti-helminthique pourra être renouvelé à six mois en cas d’échec (avis spécialisé recommandé).
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