Après une forte baisse de la consommation d'antibiotiques en ville en 2020 en raison des mesures restrictives liées au Covid, Santé publique France (SPF) fait état, dans un nouveau rapport, d'une hausse du recours à ces médicaments en 2021, en particulier en fin d'année. Néanmoins, les niveaux de consommation sont restés inférieurs à ceux de 2019.
Jusque-là, « la consommation d'antibiotiques diminuait régulièrement depuis 2011 en ville », souligne au « Quotidien » la Dr Anne Berger-Carbonne, responsable de l’Unité infections associées aux soins et résistance aux antibiotiques de SPF. La France reste toutefois le quatrième pays européen le plus consommateur depuis 2018, derrière la Grèce, la Roumanie et la Bulgarie.
En 2020, 663,5 prescriptions pour 1 000 habitants ont été enregistrées contre 704,6 en 2021, soit une augmentation de 6 %. La progression observée en 2021 est toutefois restée modérée : le niveau atteint est inférieur à celui observé en 2019, sauf chez les 0-4 ans, où la consommation est quasiment semblable à celle de 2019.
Les mesures prises en 2020 pour lutter contre le Covid ont entraîné des modifications majeures de nos habitudes sociales, expliquant très probablement la baisse drastique de consommation d'antibiotiques, tandis qu'en 2021, année encore marquée par le Covid, les restrictions ont été bien moindres, laissant la place au retour des infections hivernales au cours du dernier trimestre.
Des infections hivernales le plus souvent virales
Cette fin d'année s'est caractérisée par une hausse des consultations avec les médecins traitants et des prescriptions d'antibiotiques, bien que les infections hivernales courantes, majoritairement virales, justifient rarement une telle prescription.
« La croyance selon laquelle les antibiotiques vont raccourcir la durée de la maladie et faire baisser la fièvre reste répandue parmi les patients, constate la Dr Berger-Carbonne. Et du côté des médecins, il peut y avoir parfois à tort une crainte des complications. » Des outils sont disponibles pour combattre ces préjugés autour des antibiotiques, rappelle la responsable de SPF, comme Antibio'Malin pour le grand public et Antibioclic pour les professionnels de santé.
« Des enquêtes d'opinion régulières montrent que cette culture de l'antibiotique en France est très multifactorielle. Elle est notamment beaucoup liée à la formation médicale », rapporte la Dr Berger-Carbonne, qui appelle les médecins à davantage recourir à l'ordonnance de non-prescription réalisée par l'Assurance-maladie. Celle-ci permet d'aider les médecins à expliquer à leurs patients pourquoi il n'est pas justifié de leur prescrire des antibiotiques.
Quant aux tests rapides d'orientation diagnostique (Trod) de l'angine, qui permettent de mettre en évidence ou non une angine streptococcique, ils sont encore trop peu utilisés, alors qu'ils sont essentiels pour orienter la prise en charge.
Une campagne pour promouvoir le bon usage des antibiotiques
Le rapport de SPF montre également que la reprise des prescriptions concerne principalement l'amoxicilline, avec une augmentation de 12 % par rapport à 2020. « Une bonne chose », souligne la Dr Berger-Carbonne, alors que cet antibiotique n'est pas considéré comme un antibiotique critique, générateur de résistance, contrairement à son utilisation en association avec l'acide clavulanique, dont le recours a pourtant augmenté de 7 %. La consommation de céphalosporine, qui doit aussi être restreinte, a augmenté de 3 %. En revanche, les prescriptions de fluoroquinolones ont diminué, conformément aux recommandations.
Enfin, la responsable de SPF invite les médecins à « préférer revoir leurs patients plutôt que de prescrire tout de suite des antibiotiques ».
Le 8 octobre, SPF, le ministère de la Santé et l’Assurance-maladie ont lancé une campagne de prévention « Les antibiotiques : bien se soigner, c'est d'abord bien les utiliser » afin de sensibiliser à l'importance d'une réduction de leur consommation en population générale, avec notamment deux spots vidéos. Des affichettes sont également prévues pour les salles d’attente des professionnels de santé. Par ailleurs, du 18 au 24 novembre se tiendra la Semaine mondiale pour un bon usage des antibiotiques.
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