Comment financer le dispositif d'indemnisation pour les victimes des médicaments à base de valproate de sodium ? La création de ce fonds - demandée par l'association d'aide aux parents d'enfants souffrant du syndrome de l'anticonvulsivant (APESAC) - sera votée au Parlement cet automne dans le cadre des lois financières, a annoncé le 24 août la ministre de la Santé Marisol Touraine, précisant qu'il s'inspirera des travaux de la mission d'expertise juridique lancée en mars.
Si la ministre indiquait que cette mission devait rencontrer le laboratoire Sanofi, fabriquant de l'antiépileptique Dépakine, elle ne livrait aucune piste concrète sur les moyens d'abonder ce fonds qui sera présenté aux familles le 20 septembre.
Les marges d'action sont étroites avec un objectif national des dépenses d'assurance-maladie (ONDAM) à 1,75 % qui devrait déjà peiner à absorber les conséquences de la nouvelle convention médicale et la revalorisation du point d'indice de la fonction publique hospitalière (à tel point qu'un desserrement du taux est en discussion).
Pour résoudre le casse-tête, le député socialiste et rapporteur du budget de la sécurité sociale pour 2017, Gérard Bapt, propose de créer une « flat taxe » de 0,1 % ou 0,2 % sur le chiffre d'affaires des médicaments et des dispositifs médicaux commercialisés en France et pris en charge par l'assurance-maladie.
Le député souhaite instaurer un certain seuil de chiffre d'affaires en deçà duquel la taxe ne s'appliquerait pas, afin de ne pas pénaliser les petites entreprises et les start-up, explique-t-il au « Quotidien du médecin ». Les exportateurs seraient aussi protégés : les volumes dédiés à l'exportation ne seraient pas taxés.
33 millions de recettes, pour toutes les victimes
Selon les calculs de Gérard Bapt, taxer l'ensemble des médicaments remboursés par l'assurance maladie (un marché qu'il chiffre à environ 28 milliards d'euros par an) et des dispositifs médicaux (5 milliards) à hauteur de 0,1 % permettrait de dégager 33 millions d'euros de recettes. « Cette enveloppe ne serait pas spécifiquement dédiée aux victimes de la Dépakine », précise le député, en citant, à titre d'exemple, celles du Distilbène. Et de souligner la pertinence d'un tel fonds « eu égard à la lenteur de la justice française dans les drames sanitaires ».
Le dispositif a aussi pour particularité de faire contribuer l'ensemble des laboratoires, et non seulement Sanofi, à la différence du fonds d'indemnisation des victimes du Mediator abondé par Servier. « Si à titre personnel, je pense que par obligation morale et compassionnelle Sanofi devrait faire un geste dans l'affaire de la Dépakine, comme prendre en charge les frais d'expertise, son rôle n'est en rien comparable à celui que tint Servier dans le Mediator », déclare Gérard Bapt au « Quotidien », en rappelant que Sanofi avait proposé dès 2003 une modification de la notice de son produit (prise en compte par la France en 2006 seulement, comme le montre le rapport de l'Inspection générale des affaires sociales).
Soutien des associations
Gérard Bapt va soumettre sa proposition à la direction générale de la Santé, puis au groupe Socialiste, républicain et citoyen et à la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, dans la perspective du prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS).
Plusieurs associations dont le collectif interassociatif sur la santé (CISS), les Filles DES et le Réseau DES France (victimes du Distilbène), le collectif de lutte contre les affections iatrogènes médicamenteuses (CLAIM) ou encore la FNATH et l'APESAC plaident dans un communiqué commun en faveur d'un « véritable fonds ouvert à toutes les victimes d'effets indésirables graves de médicaments », géré par l'ONIAM. Elles appellent à faire preuve de volonté politique.
« La mutualisation d'un risque collectif présenterait un double avantage : garantir aux victimes une indemnisation rapide, et inciter les entreprises du médicament à promouvoir une politique efficace de transparence, de prévention, d'information et de responsabilisation », écrivent les associations.
L’Académie de médecine s’alarme du désengagement des États-Unis en santé
Un patient opéré avant le week-end a un moins bon pronostic
Maladie rénale chronique : des pistes concrètes pour améliorer le dépistage
Covid : les risques de complications sont présents jusqu’à trente mois après hospitalisation