FACE AUX automutilations, scarifications, crises clastiques, mises en danger ou tentatives de suicide des adolescents, les familles submergées par l’inquiétude et les éducateurs dépassés par les événements, se présentent aux urgences des hôpitaux. Des situations de détresse de plus en plus fréquentes depuis plus de 10 ans en Île-de-France qui exigent de multiplier les consultations pédopsychiatriques en urgence, car tous ces jeunes « en crise » ne relèvent pas d’une hospitalisation. Lazare Reyes, chargé de mission psychiatrie et santé mentale à l’ARS d’Île-de-France venu échanger avec les professionnels lors d’un colloque de l’AFAR mesure le manque de coordination entre la psychiatrie et la pédiatrie. Jugeant le dispositif actuel « peu visible et mal connu de la population », Lazare Reyes déplore que les structures spécialisées soient souvent saturées. « Les admissions en urgence se développent, mais les dispositifs adaptés font défaut et restent très inégalement répartis sur le territoire, » estime-t-il. L’an dernier, près de 80 000 adolescents « en souffrance » ont été conduits à l’hôpital public en Île-de-France qui ne dispose que de 520 lits dédiés pour les accueillir. L’hospitalisation réclamée par les parents qui se sentent dépassés n’est pourtant pas toujours la solution.
Besoin de temps pour une meilleure orientation.
L’ouverture de consultations spécialisées permet de régler bon nombre de difficultés. Pierre Lana psychiatre du centre hospitalier Sainte-Anne accueille désormais les adolescents. L’an dernier, 30 % de ceux qui ont rejoint les urgences de cet établissement ont été hospitalisés quelques jours. « Le temps nécessaire pour reconstituer une histoire individuelle, établir le lien avec les professionnels qui les ont suivis pour distinguer ce qui relève du délire, d’une dépression ou d’un usage de drogue. » En franchissant les portes des services d’urgence, les parents aussi n’en peuvent plus et dans ces situations de rupture familiale, la consultation prolongée de 24 heures, qui peut aller jusqu’à 72 heures en cas de crise, permet aux jeunes de se repositionner. Avant de sortir, un rendez-vous de consultation post-urgence est aussi posé pour garder le lien et trouver la meilleure orientation future.
Quand l’hospitalisation n’est pas inévitable.
Le dispositif d’aval paraît bien rodé à Paris alors que l’accueil des jeunes en Seine-et-Marne s’avère bien plus compliqué. François Gouraud, pédiatre au centre hospitalier de Meaux en témoigne. « Beaucoup d’urgences sont en fait des demandes de prise en charge dans un délai raisonnable qui n’appellent pas forcément l’intervention immédiate d’un psychiatre. Les passages à l’acte, tentatives de suicide ou somatisations requièrent une hospitalisation possible en pédiatrie. Toutefois, nous restons réellement démunis en cas de crises classiques, décompensations psychotiques qui conduisent à des sédations, des contentions relevant d’un milieu spécialisé où il n’y a jamais de place pour les plus jeunes », regrette-t-il. La situation devrait s’améliorer puisque le représentant de l’ARS promet 50 lits supplémentaires et 4 unités infra régionales dédiées aux adolescents en crise qui présentent des troubles psychiatriques incompatibles avec la pédiatrie.
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