C’EST UN PARADOXE qui a la vie dure. Alors qu’en France, l’impact des vaccinations de routine de l’enfant au cours du XXe siècle sur la réduction de la mortalité liée à de nombreuses maladies infectieuses est spectaculaire, la confiance que leur accorde la population n’a peut-être jamais été aussi mise à mal.
Souvent questionnés sur leur innocuité, les vaccins le sont aussi régulièrement sur leur réelle utilité sanitaire. Et l’argument qui consiste à démontrer qu’ils ont permis d’éradiquer dans le pays certaines maladies comme la variole ou de faire baisser de plus de 99 % la mortalité liée à d’autres infections (tétanos, coqueluche, rougeole, etc.) n’a semble-t-il que peu d’impact sur les plus sceptiques.
Une explication historique et psychologique.
Pour Jocelyn Raude, sociologue à l’École des hautes études en santé publique, cette défiance est « le fruit de facteurs qui tiennent à l’environnement informationnel ainsi qu’à l’histoire récente et aux évolutions sociétales ». Alors qu’au cours du XIXe siècle et de la première moitié du XXe siècle, « les gens ont pu observer les effets bénéfiques de la vaccination », l’éradication ou la très faible prévalence de certaines maladies infectieuses liées à l’utilisation généralisée des vaccins a entraîné par la suite « une perte de motivation directement issue de la disparition intuitive du risque résultant de l’observation directe ». Concrètement, pourquoi se faire vacciner contre une maladie dont personne ou presque dans son entourage n’est atteint ?
Autre vecteur de méfiance parmi la population, la diffusion de quantité d’informations anxiogènes non vérifiées scientifiquement, principalement sur Internet. Couplées à des controverses publiques comme celle qui s’est étendue lors de l’épisode de la grippe A/H1N1 en 2010, ces polémiques ont des conséquences non négligeables sur la couverture vaccinale qu’elles contribuent à détériorer. D’après le Pr François Denis, vaccinologue et spécialiste des maladies infectieuses au CHU de Limoges, les effets délétères de ce climat de suspicion généralisée sont patents : « En 10 ans, nous avons perdu dans le seul Limousin plus de 10 points sur la vaccination anti-grippale des plus de 65 ans ».
Mieux former et informer
Toutes les études le prouvent. À mesure que grandit la couverture vaccinale dans la population, la maladie recule d’autant jusqu’à, dans certains cas, totalement disparaître. En corollaire, lorsqu’un épisode de perte de confiance envers les vaccins s’installe et que leur utilisation diminue, la survenue d’une épidémie est plus que probable. L’objectif est donc, pour les scientifiques et professionnels de santé, ainsi que pour les entreprises qui produisent des vaccins, de redémontrer les bénéfices de la vaccination sur la protection individuelle et collective et de garantir aux médecins et patients que tout est mis en œuvre en termes de sécurité et de qualité des produits. À cet effet, le LEEM vient de publier 16 propositions soutenant les actions du Programme national d’amélioration de la politique vaccinale 2012-2017.
Si comme le rappelle le Pr Denis, « il est inévitable que des événements indésirables (syndromes ou maladies) surviennent au décours d’une vaccination », il demeure « essentiel de savoir démêler le vrai (lien de causalité) du faux (simple coïncidence) ». D’autre part, ce dernier insiste sur la nécessité de renforcer l’enseignement initial et la formation continue de la vaccinologie, ainsi que de mieux associer et impliquer les personnels soignants dans les campagnes de vaccination. Selon lui, « jamais les polémiques autour de la vaccination n’ont été aussi vives, [alors que] jamais les vaccins n’ont été aussi sûrs ».
L’Académie de médecine s’alarme du désengagement des États-Unis en santé
Un patient opéré avant le week-end a un moins bon pronostic
Maladie rénale chronique : des pistes concrètes pour améliorer le dépistage
Covid : les risques de complications sont présents jusqu’à trente mois après hospitalisation