Le Parlement européen s’est prononcé ce mardi 8 octobre sur la directive sur les produits du tabac portée par Linda McAvan, eurodéputée travailliste, chef de file des anti-tabac. Les députés ont eu à examiner pas moins de 189 amendements. « Le lobby du tabac s’est montré très agressif » et a affaibli la proposition originale de la commission européenne, a reconnu Linda McAvan.
Selon les chiffres donnés par des élus, le seul cigarettier Philip Morris a investi 1,4 million d’euros pour convaincre les eurodéputés de gommer les aspects les plus contraignants du projet de loi européen. Au final, les eurodéputés ont convenu de porter à 65 % de la surface des paquets de cigarette les avertissements de mise en garde contre l’usage du tabac avec la marque du cigarettier apposée en bas. Aujourd’hui, la proportion est de 30 à 40 % selon la face du paquet. Mais la Commission proposait un affichage à 75 %.
Contre l’avis de la Commission, les cigarettes fines « slim » resteront sur le marché, mais les paquets ne pourront plus avoir la taille d’un emballage de bâton de rouge à lèvres. Les cigarettes aromatisées disparaîtront progressivement du marché d’ici 3 ans, voire 8 ans pour les cigarettes mentholées. Enfin, les paquets de moins de 20 cigarettes sont prohibés.
L’e-cigarette sans statut pharmaceutique exclusif
Les députés ont en revanche refusé d’accorder à la cigarette électronique le statut de médicament de façon systématique, en votant à 286 voix (majoritairement socialistes et écologistes) l’amendement 170 soutenu par l’eurodéputée Frédérique Ries. L’e-cigarette peut donc rester en vente libre, chez les buralistes ou dans les boutiques spécialisées, à moins que le fabricant n’affirme explicitement que son produit peut avoir un effet curatif et demande une autorisation de mise sur le marché, auquel cas, elle sera vendue en officine et pourra être prescrite par les tabacologues, comme les autres traitements d’arrêt du tabac.
La plupart des élus de droite ont refusé une proposition de la Commission européenne qui souhaitait que la cigarette électronique soit soumise aux mêmes règles que celles s’appliquant aux médicaments. Une notice de mise en garde devrait néanmoins l’accompagner, avec la publication des éléments la composant. La vente aux mineurs et la publicité demeurent interdites.
L’adoption de ce texte l’empêche d’être reporté après les élections européennes de mai 2014 comme le souhaitaient les fabricants de tabac. Le texte sera soumis dès la semaine prochaine aux représentants des 28 États membres. Un accord entre le Parlement, le Conseil et la Commission pourrait être trouvé d’ici Noël. Dans ce cas, la proposition reviendra devant le Parlement pour être définitivement entérinée.
Réactions mitigées
Malgré les assouplissements apportés au texte de la Commission, des partisans d’une législation sévère à l’encontre du tabac se sont félicités de son adoption. « C’est une première victoire, le Parlement n’a pas cédé aux intérêts des marchands de mort que sont les lobbyistes du tabac », a estimé l’eurodéputée française Françoise Grossetête qui, à l’image d’une majorité des élus français du PPE, était plutôt en phase avec la Commission.
Mais la cigarette électronique continue à faire polémique. « Il n’aurait pas été logique de priver les clients de l’accès aux nouveaux produits électroniques qui font preuve de réussite dans le sevrage des personnes des effets nocifs du tabac », affirme l’eurodéputée libérale belge Frédérique Ries.
Les partisans de la cigarette électronique sont soulagés. « C’est un moment historique, a déclaré le président du collectif des acteurs de la cigarette électronique (CACE), Mickaël Hammoudi. La cigarette électronique n’est pas un outil de sevrage, et donc pas un médicament. C’est un produit d’avenir qui peut être amené à remplacer définitivement le tabac », a-t-il assuré.
Pour Corinne Lepage, les lobbies du tabac ont gagné
L’Office français de prévention du tabagisme (OFT), qui a fait campagne avec l’association de consommateur AIDUCE contre un statut pharmaceutique exclusif, se réjouit du vote de l’amendement 170. « Passer de la cigarette à l’e-cigarette est un bénéfice pour la santé », estime-t-elle.
En revanche, la présidente de Cap 21 Corinne Lepage juge que les lobbies du tabac ont gagné et que les dispositions adoptées sur l’e-cigarette risquent d’encourager de nouveaux consommateurs à vapoter. Même désaveu de la part de Nora Berra qui y voit un encouragement à la création de cigarettes de deuxième génération et à leur commercialisation par l’ensemble de l’industrie du tabac.
« En faire un produit de consommation courante, et non pas un produit de sevrage bénéfique pour la santé, constituera une porte d’entrée vers le tabac c’est-à-dire l’inverse de l’effet recherché », regrette l’ancienne secrétaire d’État à la Santé qui demande l’application du principe de précaution.
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