Alors que l’Institut Pasteur de Paris vient d’identifier une entérobactérie responsable de la contamination des poches d’alimentation à l’origine des décès de trois nourrissons à l’hôpital de Chambéry, le Pr Alexandre Lapillonne (réanimation néonatalogie, hôpital Necker, Paris) explique pourquoi les services de néonatalogie sont les plus gros prescripteurs de nutrition parentérale individualisée et quelles sont les sources d’approvisionnement. À Paris, seules deux pharmacies hospitalières préparent ces poches pour les 6 à 7 services de néonatalogie de l’AP.
La néonatalogie : les plus grosses prescriptions
« En néonatalogie, nous avons à prendre en charge une population de patients qui ont des besoins nutritionnels spécifiques soit en raison de la pathologie ayant conduit à leur hospitalisation, soit en raison de leur degré de maturation et de leur tolérance métabolique. Cette population d’enfants est de fait hétérogène car nous nous traitons des grands prématurés avec des besoins nutritionnels très spécifiques, mais aussi des enfants nés proches du terme ou à terme mais qui présentent une pathologie médicale ou chirurgicale. Chaque enfant a donc des besoins nutritionnels qui lui sont spécifiques et qui dépendent entre autres de leur âge, de leur pathologie, de leur maturation et de leur tolérance métabolique », explique le Pr Alexandre Lapillonne.
Mais qui fournit ces solutés ? Pourquoi l’enquête concernant l’hôpital de Chambéry a-t-elle d’emblée permis de cibler deux fournisseurs dont il s’avère aujourd’hui qu’un seul, le laboratoire Marette, a fourni les poches. « Il y a plusieurs voies d’approvisionnement », confirme le Pr Lapillonne avant de détailler les 4 circuits existants.
• Les solutés standards : depuis peu
La première est de prescrire un soluté standard commercialisé par l’industrie. Des solutés spécifiquement conçus pour le nouveau-né sont disponibles en France depuis 3 – 4 ans. On peut par exemple citer la gamme Pediaven commercialisée par la société Fresenius ou le NP 100 commercialisé par l’Assistance Publique-Hôpitaux de Paris. Ces solutés bénéficient d’une AMM chez le prématuré.
Le RCP de ces produits prévoit toutefois qu’ils puissent être modifiés et que des ajouts puissent être réalisés. « On peut ajouter dans des conditions spécifiques, de préférence sous flux laminaire et en respectant le RCP, des oligo-éléments, des vitamines ou certains ions afin d’adapter ces solutés standards aux besoins de l’enfant. »
• La pharmacie hospitalière : 2 cas
La deuxième est celle de la nutrition parentérale individualisée. « La néonatalogie est le plus gros prescripteur de nutrition parentérale individualisée. Les pharmacies hospitalières travaillent donc essentiellement avec les services de néonatalogie. L’ordonnance du médecin est adressée au pharmacien hospitalier qui, dans les plus grosses structures hospitalières dispose d’une unité de production de solutés parentéraux » affirme le Pr Lapillonne.
Ils sont produits dans une salle blanche par des automates, dans des conditions d’asepsie parfaite, et garantissent la galénique (vérification du risque de précipitation) et la sûreté microbiologique. Les solutés sont étiquetés au nom de chaque enfant pour lequel la préparation a été demandée en indiquant clairement la composition de la poche. Ces données seront contrôlées par les infirmières au moment de l’utilisation.
« C’est ultra-confortable, précise le néonatalogiste, mais ce mode de prescription a un coût élevé si le nombre de poches préparées est faible ». À l’Assistance Publique, la préparation des poches de nutrition parentérale est mutualisée et actuellement seules deux pharmacies hospitalières préparent ces poches pour les 6 à 7 services de néonatalogie de l’AP.
La troisième, celle des plus petits centres, est de demander une préparation au pharmacien hospitalier. « Les petits centres hospitaliers ne disposent pas d’automate, c’est donc au pharmacien de préparer la poche de nutrition parentérale correspondant à la prescription, en général sous flux laminaire » explique Alexandre Lapillonne. Par contre, la préparation de poche de nutrition parentérale directement dans les services de soins ne doit plus se faire car il n’y a aucune garantie bactériologique ni galénique et aucun contrôle par un pharmacien alors que la nutrition parentérale rentre dans le champ du médicament.
• Les prestataires externes, dont Marette
Enfin, la quatrième solution adoptée par l’hôpital de Chambéry, comme beaucoup d’hôpitaux français est de s’adresser à prestataire de service externe, c’est-à-dire un industriel ayant les capacités techniques et les autorisations pour ce type d’activité. La qualité de préparation est en général considérée comme excellente et comparable à celle des pharmacies hospitalières équipées de salle blanche.
L’inconvénient principal est que la prescription doit en général se faire 24 à 48 heures en avance pour permettre la fabrication et la délivrance en temps et heure.
« Ces industriels ont le droit de fabriquer des poches standards nominatives mais pas celui de fabriquer des poches standards » précise le Pr Lapillonne.
Immaturité du microbiote
Enfin, alors que la contamination bactériologique des poches de nutrition parentérale s’avère certaine, d’autres hypothèses auraient pu être envisagées. « D’autres possibilités de contamination bactérienne « en série » ont été décrites dans les services de néonatalogie. Si les infections liées à l’alimentation entérale et non respect de la chaîne du froid sont bien connues, il ne faut pas oublier que le microbiote intestinal du prématuré est très dépendant de la flore de l’environnement et qu’une fois colonisé, des translocations sont possibles dans certaines conditions, translocations pouvant être responsables d’infection graves voire fatales » tient à souligner le Pr Lapillonne.
Le taux de micro/nanoplastiques dans l’athérome carotidien est associé à la sévérité des symptômes
Dans la cholécystite, la chirurgie reste préférable chez les sujets âgés
Escmid 2025: de nouvelles options dans l’arsenal contre la gonorrhée et le Staphylococcus aureus
Yannick Neuder lance un plan de lutte contre la désinformation en santé