Dans un rapport sur l’évaluation des risques pour la santé de l’accident nucléaire survenu à Fukushima, en mars 2011, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) estime qu’« aucune augmentation observable des taux de cancer n’est prévue » pour la population générale à l’intérieur et à l’extérieur du Japon, en revanche. En revanche « le risque estimé pour certains cancers augmente dans des catégories données de la population de la préfecture de Fukushima ».
L’évaluation, la première du genre, avait pour principal objectif d’estimer l’impact potentiel de l’accident afin de pouvoir anticiper les besoins de santé futurs et prendre des mesures de santé publique. Elle se fonde sur l’estimation préliminaire des doses de radiation déjà présentée dans un précédent rapport publié par l’OMS en mai 2012. Les experts, prudents, indiquent que la compréhension des effets des radiations, en particulier à doses faibles, peut encore s’améliorer à l’avenir.
Risques pour la zone la plus contaminée
« Compte tenu des niveaux d’exposition estimés, l’augmentation du risque de cancer est l’effet potentiel sur la santé le plus significatif », soulignent-ils. Pour les personnes situées dans la zone la plus contaminée, l’augmentation des risques estimés s’établit à :
- 4 % environ pour l’ensemble des cancers solides, chez le sujet de sexe féminin exposé au stade de nourrisson ;
- 6 % environ pour le cancer du sein, chez le sujet de sexe féminin exposé au stade de nourrisson ;
- 7 % environ pour la leucémie, chez le sujet de sexe masculin exposé au stade de nourrisson ;
- 70 % au maximum pour le cancer de la thyroïde, chez le sujet de sexe féminin exposé au stade de nourrisson (chez la femme, le risque de cancer de la thyroïde au cours de la vie entière est normalement de 0,75 % et le risque additionnel estimé au cours de la vie entière est de 0,50 % pour un nourrisson de sexe féminin exposé dans la zone la plus touchée).
Concernant les personnes vivant dans la deuxième zone la plus contaminée de la préfecture de Fukushima, les risques estimés sont inférieurs de moitié environ à ceux de la zone aux doses les plus élevées, précisent les experts.
Une surveillance à long terme
Par ailleurs, les 2/3 environ des travailleurs d’urgence présenteraient des risques de cancer semblables à ceux de la population générale, et un tiers d’entre eux aurait un risque majoré. Ils indiquent également que les doses de rayonnements « ne devraient pas augmenter l’incidence des fausses couches, des mortinaissances et des autres problèmes de santé physique et mentale susceptibles de toucher les nourrissons nés après l’accident ».
« Le rapport de l’OMS souligne qu’il faut surveiller à long terme l’état de santé des personnes exposées à un risque élevé tout en fournissant les services nécessaires pour le suivi médical et le soutien », a déclaré le Dr Maria Neira, directeur du département Santé publique et environnement de l’OMS. « En plus de renforcer les services médicaux et de soutien, il faut assurer une surveillance continue de l’environnement, en particulier des aliments et de l’eau, et veiller à l’application la réglementation existante, en vue de réduire à l’avenir l’exposition potentielle aux radiations », a ajouté le Dr Angelika Tritscher, directeur par intérim du département de l’OMS Sécurité sanitaire des aliments et zoonoses.
Outre l’incidence directe sur la santé de la population, le rapport note que l’impact psychologique pourrait avoir des conséquences sur la santé et sur le bien-être.
« Le rapport de l’OMS sous-estime honteusement l’impact des premières radiations de la catastrophe de Fukushima sur les personnes présentes à l’intérieur de la zone d’évacuation d’un rayon de 20 kilomètres, et qui n’ont pas été capables de partir rapidement » , déplore le Dr Rianne Teule , expert de Greenpeace en matière de radiation nucléaire. Selon l’organisation, « ce rapport est à considérer comme une déclaration politique pour protéger l’industrie nucléaire et non pas comme un travail scientifique axé sur la santé des personnes » .
Le gouvernement japonais conteste aussi, mais d’un autre point de vue, les conclusions de l’étude. « Ces calculs ont été basés sur l’hypothèse que les gens ont continué de vivre dans cette zone et de manger de la nourriture interdite. Mais ce n’est pas le cas » , a expliqué à l’AFP un responsable du ministère de l’Environnement en soulignant que les experts étaient toujours « divisés sur la manière de calculer l’impact d’une exposition à long terme à de faibles doses radioactives » .
Quelque 110 000 riverains de la centrale de Fukushima (résidents installés à moins de 20 km) ont été évacués dans les jours et semaines suivant l’accident. Environ 50 000 habitants supplémentaires de la préfecture de Fukushima ont décidé de déménager par précaution.
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