L’INSERM, missionné par la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (MILDT)* en prélude au Plan de lutte contre les drogues et les conduites addictives 2013-2017, a établi un bilan des connaissances scientifiques sur les vulnérabilités des adolescents à l’usage des substances psychoactives.
« Un état des lieux loin des postures idéologiques, fondé sur l’évidence scientifique », insiste le Pr Jean-Paul Moatti, directeur de l’Institut. Les experts, qui se sont appuyés sur la littérature la plus exhaustive, ont ainsi évalué les « vrais » risques des substances psychoactives, alcool, tabac, etc., pour l’adolescent (de 10 à 18 ans) et posé les bases de stratégies de prévention et d’intervention efficaces à cet âge.
Risque de dépendance ultérieure
À l’évidence, l’usage des substances psychoactives, le premier joint, le premier verre, doit être débanalisé. Et quel que soit le produit, la précocité de l’expérimentation à une période critique de maturation cérébrale augmente le risque de dépendance ultérieure…
Plus précisément, s’agissant de l’alcool, la drogue préférée des adolescents (91 % des garçons et des filles l’ont expérimentée à la fin de l’adolescence), 7 % des élèves en font un usage régulier en classe de 3e, 10 % des plus de 17 ans sont ivres au moins 10 fois dans l’année. Les alcoolisations ponctuelles importantes (5 verres d’alcool en une même occasion) sont en hausse continue.
Or les effets d’une alcoolisation massive et rapide à cette étape du développement sont connus qui associent des atteintes structurales et fonctionnelles avec un déficit cognitif plus marqué que chez l’adulte, les adolescents étant plus sensibles aux dommages cérébraux créés par l’alcoolisation, déficits mnésiques et des apprentissages, et plus encore les filles.
Risque d’alcoolodépendance multiplié par 2
L’initiation précoce (versus à l’adolescence tardive) double le risque d’alcoolodépendance sur la vie entière. Enfin, « une consommation rapide d’alcool détruit davantage les neurones et la substance blanche, le câblage », observe Mickael Naassila, INSERM ERi24-GRAP (Groupe de Recherche sur l’Alcool et les Dépendances), UFR de pharmacie à Amiens.
En ce qui concerne le tabac, première substance consommée quotidiennement, deux tiers des jeunes à 17 ans l’ont expérimenté. Un tiers en font un usage régulier et ce début de consommation précoce, avant 17 ans, multiplie par 2 le risque de décès prématuré à 60 ans. Quant au cannabis, 42 % des adolescents l’ont expérimenté, 7 % l’utilisent au moins 10 fois par mois, ce qui entraîne des troubles cognitifs le plus souvent (attention, mémoire de travail, troubles de la planification, etc.). « Une perte de chance adaptative à l’origine d’un cercle vicieux… », souligne le Dr Alain Dervaux, service d’addictologie à Sainte-Anne (Paris), Centre de psychiatrie et neurosciences UMR 894 INSERM.
À l’arrêt, les troubles disparaissent en un mois, mais persistent des troubles subtils si la consommation a été précoce, avant 15 ans. Environ 5 % des adolescents, dépendants, en font un usage problématique et les manifestations de sevrage sont alors patentes. Plus rare, mais plus grave, le risque de vulnérabilité accru aux troubles psychiatriques, schizophrénie en tête.
Jeux vidéo et Internet
Dernière pratique addictive explorée, celle des jeux vidéo et d’Internet ; 80 % des plus de 17 ans y consacrent au moins deux heures par jour, 3 à 5 % en faisant un usage problématique, de plus de 10 heures par jour. Au passif de ce temps passé sur écran, une accélération de la phobie sociale, les garçons étant les plus vulnérables et les Massive Multiplayer Online Role Playing Games les plus addictogènes.
« Pour prévenir ces comportements, nous devons mettre au point des programmes qui mobilisent les ressources propres face à l’addiction plutôt que d’interdire, grâce notamment à des consultations dédiées*, "jeunes consommateurs", des lieux où les personnels de soins sont invités à "aller vers", là où sont les jeunes qui, comme chacun sait, ne sont pas de vrais ados s’ils demandent des soins ! », rappelle le Dr Olivier Phan, Centre Pierre Nicolle (Croix Rouge Française à Paris), Unité d’addictologie de la clinique Dupré à Sceaux et INSERM U669 Maison des adolescents à Paris.
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