La HAS ne recommande pas l’extension du dépistage de la drépanocytose à tous les nouveau-nés

Publié le 11/03/2014
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La Haute Autorité de santé (HAS) publie ce mardi 11 mars un rapport assorti d’un avis sur le dépistage néonatal de la drépanocytose. La Haute Autorité a, à la demande de la Direction générale de la santé (DGS), évalué l’intérêt d’étendre ce dépistage à tous les nouveau-nés en métropole. En effet, la drépanocytose est l’une des 5 maladies dépistées à la naissance avec la phénylcétonurie, l’hypothyroïdie congénitale, l’hyperplasie congénitale des surrénales, la mucoviscidose.

Si dans le cas des quatre autres maladies, le dépistage est universel, il est, pour la drépanocytose, proposé en métropole seulement aux nouveau-nés de parents originaires de zone géographique à risque (Afrique subsaharienne, certaines régions de la péninsule arabique, Inde et pourtour méditerranéen). Dans les DOM tous les enfants sont concernés.

Trop d’inconnues

À l’issue d’une revue de la littérature sur la situation actuelle en France, en Europe et Amérique du Nord ainsi que sur les données épidémiologiques les plus récentes et après avoir consulté experts et représentants d’association œuvrant dans le domaine, la Haute Autorité estime que l’efficacité d’une extension du dépistage n’est pas démontrée.

« Au niveau national, les inconnues tant épidémiologiques que démographiques ne permettent pas d’estimer les bénéfices en termes de cas supplémentaires dépistés », souligne la HAS. De même, il n’a pas été identifié de données robustes sur le nombre d’enfants drépanocytaires non détectés par la stratégie de dépistage ciblé.

« Étant donné qu’il n’y a pas non plus de signal indiquant un manque d’efficacité de la stratégie actuelle, la HAS ne préconise pas d’étendre le dépistage de la drépanocytose à tous les nouveau-nés », conclut l’avis.

La plus fréquente des maladies dépistées

Un bilan réalisé par l’Association française pour le dépistage et la prévention des handicaps de l’enfant (AFDPHE) en charge du dépistage néonatal, indique qu’en 2012, 382 cas (310 en métropole et 82 dans les DROM-COM) sur 309 858 nouveau-nés testés pour la drépanocytose (37 % de la population des 836 000 bébés nés cette année-là) ont été repérés, soit une prévalence observée à la naissance de 0,12 % de la population des nouveau-nés testés et 0,04 dans la population totale (1/2546). « La drépanocytose est la plus fréquente des maladies repérées dans le cadre du dépistage néonatal », souligne la HAS.

L’objectif principal de ce dépistage est de repérer les formes majeures de drépanocytose afin de mettre en place une prise en charge appropriée dès l’âge de 2 ou 3 mois, période à laquelle peuvent survenir les premières complications, l’enfant étant à la naissance en bonne santé, protégé par la présence de l’hémoglobine fœtale.

Maladie autosomique récessive, elle est liée à une mutation du gène codant la synthèse de la chaîne bêta-globine et transmise à la fois par le père et la mère (homozygote) et conduisant à la fabrication d’hémoglobine anormale (HbS). Des formes hétérozygotes composites existent.

Problème de l’information en cas d’hétérozygotie

Cependant l’une des particularités du dépistage néonatal, c’est qu’il conduit à la découverte de nouveau-nés hétérozygotes (11 926 en 2012 dont 9 036 porteurs d’une HbS). L’une des demandes de la DGS concernait l’information à donner en cas de découverte d’une hétérozygotie, c’est-à-dire d’un nouveau-né ayant un seul exemplaire du gène muté transmis soit par la mère soit par le père.

L’enfant hétérozygote n’est pas malade mais peut éventuellement transmettre la mutation à sa descendance. Sur ce point, la HAS souligne qu’il n’est pas de son ressort de se prononcer d’un point de vue éthique sur l’opportunité de transmettre ou non cette information. Toutefois, elle constate que le contenu de cette information devrait faire l’objet d’un consensus et que sa délivrance devrait, compte tenu de son impact, permettre un temps d’échanges entre les parents et les professionnels de santé. Or ces conditions ne sont pas aujourd’hui totalement remplies alors qu’un élargissement du dépistage ne ferait qu’augmenter le nombre d’hétérozygotes détectés.

Dr Lydia Archimède

Source : lequotidiendumedecin.fr