La surprise Nora Berra

Publié le 17/11/2010
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Crédit photo : S TOUBON

CE NE DEVAIT pas être elle. Sa nomination comme secrétaire d’État chargée de la Santé a été décidée en toute dernière minute dimanche soir. Sur la base de plusieurs critères : Nora Berra est à la fois femme, médecin, issue de l’immigration, encore jeune (46 ans), et sans contentieux l’opposant à son ministre de tutelle, l’influent Xavier Bertrand.

La nouvelle a créé un effet de surprise au sein du monde médical. Nora Berra ? Le nom n’appelle pas de longs discours. Tant en médecine de ville qu’à l’hôpital, on admet savoir bien peu de chose sur l’ancienne secrétaire d’État aux personnes âgées. En off, ce médecin confie ses doutes : « Nora Berra connaît mal la médecine ambulatoire et l’hôpital, même si elle y a effectué quelques vacations. Elle a été formée à l’étranger, sa culture médicale de départ n’est donc pas la nôtre. C’est un sujet d’inquiétude, à l’heure où s’accumulent les dossiers chauds. » Le Dr Jacques Caton, chirurgien orthopédique lyonnais, est au contraire optimiste : « Je l’ai déjà rencontrée deux fois, sa porte s’ouvre facilement. Elle a eu l’air de très bien connaître la dépendance. Roselyne Bachelot, pas une fois, n’a reçu les chirurgiens. J’attends de Nora Berra qu’elle renoue le contact avec nous. »

La biographie de Nora Berra est en ligne sur son blog. Une naissance en 1963 à Lyon, une enfance aux côtés de dix frères et sœurs. Fille de tirailleur, petite-fille de spahi, Nora Berra veut être médecin... et le devient. Elle entre au service d’immunologie clinique à l’hôpital Edouard-Herriot (CHU de Lyon) en 1991, y enchaîne les vacations en tant qu’attachée. Elle travaille aussi dans l’industrie pharmaceutique. En 2009, après une courte carrière politique à Lyon, la voici qui entre au gouvernement.

Parcours.

Sa biographie fait une impasse : nulle mention de ses études en Algérie. Son ancien chef de service, qui se trouve être également son adversaire politique à Lyon, raconte : « Nora Berra a raté le concours d’entrée à la fac de médecine de Lyon. Du coup, elle est allée faire sa médecine à Oran. À son retour, ses proches me l’ont présentée, se souvient le Pr Jean-Louis Touraine, député PS et premier adjoint au maire de Lyon. Elle voulait du travail. Je lui ai proposé de travailler sur le SIDA dans mon service, et je l’ai formée. » La moitié des médecins du service de Jean-Louis Touraine sont d’origine étrangère. « Nora Berra n’a pas voulu passer le concours d’équivalence, poursuit celui-ci. Elle est toujours médecin à diplôme étranger. Sans doute sera-t-elle plus sensible que quiconque à la question des médecins à diplôme étranger. »

Le Pr Kamel Sanhadji exerce dans le service du Pr Touraine. Lui aussi fait de la politique à Lyon, comme conseiller municipal socialiste. Nora Berra, nous dit-il, est plus qu’une ancienne collègue. Une amie. Sa nomination au poste de secrétaire d’État à la Santé lui paraît « légitime ». « Elle a bien géré le secteur des personnes âgées. Elle a sa compétence », commente-t-il. Nora Berra est-elle porteuse d’une vision pour la médecine en France ? La réponse se fait évasive. Connaît-elle bien l’hôpital ? « Peut-être bien, mais pas très bien ». Et la médecine de ville ? « Elle connaît mieux l’hôpital », esquive le Pr Sanhadji.

Le Pr Jean-Michel Dubernard, ancien député UMP lyonnais, exerce comme l’a fait Nora Berra, au CHU de Lyon. Il commente en ces termes l’ascension politique de sa consœur : « Sa première nomination au gouvernement (en juin 2009) a pu apparaître comme une surprise, mais elle a travaillé beaucoup au niveau des aînés. C’est pour cela qu’elle est restée. Elle sera très présente sur la santé, notamment sur l’HAD. Xavier Bertrand est plus politique qu’elle, il va la guider. Le couple va fonctionner parfaitement. »

DELPHINE CHARDON

Source : Le Quotidien du Médecin: 8857