Que sais-je de l’IVG ?

L’ABC du professeur Nisand

Publié le 18/06/2012
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UNE GÉNÉRATION s’est écoulée depuis la légalisation de l’avortement par la loi Veil en 1976. Passée au tamis des lois Roudy en 1982, qui autorise son remboursement par l’assurance-maladie, Neiertz en 1993, qui dépénalise l’auto-avortement et crée le délit d’entrave à l’IVG, et Aubry en 2001, l’IVG est devenu un « droit évident mais fragile ». Parmi les pays européens, l’Irlande, la Pologne, Malte et Chypre considèrent l’avortement comme illégal. Dans le monde, 32 pays l’interdisent, et 36 ne l’acceptent qu’à condition que la vie de la mère soit en danger.

En France, il y aurait selon la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) 15 IVG pour 1 000 femmes, une moyenne dans l’Europe (où les taux s’échelonnent de 6 à 25,8 ‰). Les femmes de 20 à 29 ans accusent le taux le plus élevé (24,5 ‰).

L’avortement banalisé ? Loin de s’en tenir aux chiffres bruts, distillés dans les premiers chapitres en guise de cadrage, l’ouvrage d’Israël Nisand et col. prend le lecteur par la main pour explorer tous les enjeux de l’IVG, psychologiques, physiques, sociaux, culturels, et médicaux.

Accompagner les femmes.

La pédagogie de l’ouvrage ne porte pas seulement sur l’avortement en lui-même. Certes, on apprend les différentes méthodes (chirurgicale et médicamenteuse, discrètement encouragée), les risques, les coûts, ou les lois. Mais les auteurs insistent surtout sur la nécessité d’accompagner la femme dans ses choix. Décrivant chaque étape, la première puis la seconde consultation, l’IVG, et « l’après IVG : cicatrice et construction », ils insistent sur « l’écoute dont doit faire preuve le professionnel. Il ne peut s’arrêter au côté technique de l’entretien, il doit pouvoir s’adapter à la singularité de la femme qu’il rencontre et ceci se fait avant tout en l’écoutant ». Elle demande à (a)voir le cliché de l’échographie ? Le professionnel doit reformuler la question pour connaître la question cachée de la mère ambivalente. Elle est indécise une fois la semaine de réflexion écoulée ? « L’équipe doit être un ensemble d’interlocuteurs neutres et bienveillants ». Le compagnon est un « passager clandestin » ? « Bien que la décision in fine revienne entièrement à la femme, redonner sa place au compagnon et lui donner la parole lorsque cela est possible constitue une habitude professionnelle profitable ».

Les formes de détresse sont également subtilement dépeintes, parfois illustrée par un cas. L’inconscient, l’acte manqué freudien, le lapsus, sont plusieurs fois convoqués : aucune prévention ne peut les faire disparaître. Le message qui se dégage de l’ouvrage est clair : même si la femme rit ou affiche une indifférence insolente, c’est un être en souffrance. « Aucune IVG est vécue à la légère ».

L’école de la pornographie.

Attendu de la part du fondateur du fil Info Ado de la région Strasbourgeoise, un long paragraphe est consacré aux mineurs, chez qui l’IVG provoque les plus importantes séquelles et représente un facteur de risque de répétition. Le plaidoyer est quasi politique : l’information scolaire doit détrôner la pornographie qui devient aujourd’hui un mode d’enseignement personnel. « Il y a un clivage entre le savoir et le vécu Lorsque le réel est là, le savoir n’est pas toujours présent », écrit Israël Nisand.

Israël Nisand, Luisa Araujo-Attali, Anne-Laure Schillinger-Decker, L’IVG, PUF, col. Que sais-je, 127 pages, 9,20 euros.

 COLINE GARRÉ

Source : Le Quotidien du Médecin: 9143