Dans un article publié ce 24 novembre dans la revue « The Lancet », 15 professionnels de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) reviennent sur les moyens mobilisés dans la nuit du 13 au 14 novembre dernier pour faire face à l’afflux massif des blessés victimes des attentats survenus à Paris, qui a justifié le déclenchement du plan blanc. C’est la première fois que ce plan est activé depuis sa mise en place, il y a 20 ans, soulignent les auteurs.
Les clés de la réussite
L’article donne successivement le point de vue des urgentistes, celui des anesthésistes et, enfin, des chirurgiens traumatologues. « Les médecins urgentistes, bien que formés depuis plus de 30 ans à la médecine de catastrophe, n’avaient jamais eu à faire face à un nombre aussi important de victimes et de blessés à opérer le plus rapidement possible. Une nouvelle étape a été franchie », soulignent les praticiens qui décrivent les gestes précis déployés ce soir-là, « l’application civile de la médecine de guerre » et soulignent la « mobilisation exemplaire ». Une cellule de crise composée de 15 personnes et de 5 médecins a rapidement été mise en place pour répondre aux appels, trier et dispatcher les équipes mobiles (un médecin, une infirmière et un chauffeur) vers les blessés et les hôpitaux les plus appropriés. Parallèlement, 45 équipes médicales du SAMU et des pompiers ont été répartis sur les sites des catastrophes, et 15 autres maintenues en réserve, en cas de nouvelle attaque. « Cette approche a permis d’éviter la saturation des services – souvent, dans les situations d’urgence, toutes les ressources sont déployées sur le premier site, entraînant une pénurie ailleurs. »
À l’hôpital, les équipes ont rapidement été mobilisées – le plan blanc a permis de les rappeler et beaucoup de médecins et d’infirmières se sont présentés spontanément. Un des éléments clés de la réussite de la prise en charge a été l’excellente coopération entre tous les acteurs, orchestrée par des « médecins coordinateurs » qui n’étaient pas directement impliqués dans les soins mais dans la gestion des équipes. « 24 heures après les attaques (...) l’hôpital était presque prêt à faire face à une nouvelle catastrophe », précisent les auteurs. Au total, 302 blessés ont été pris en charge (256 amenés par les équipes de secours et les autres arrivés par leurs propres moyens). La Pitié-Salpêtrière (53 blessés dont 28 en « urgence absolue »), Saint-Antoine (45 blessés dont 6 en « urgence absolue ») et l’Hôpital européen Georges-Pompidou (41 dont 11 en « urgence absolue ») ont été particulièrement sollicités.
Le chirurgien traumatologue, pour sa part, relève comment les conflits habituellement rencontrés en salle d’opération ont été dépassés cette nuit-là. « Alors que les salles d’opérations sont souvent décrites comme des lieux de travail difficile sur le plan humain, pendant ce "stress test" les difficultés se sont comme dissipées, le travail en équipe était fluide et même harmonieux. »
« L’AP-HP a démontré son efficacité »
Dans leurs conclusions, les auteurs reviennent sur les critiques souvent formulées vis-à-vis de la taille de l’AP-HP – 40 hôpitaux, 100 000 professionnels de santé, 22 000 lits et 200 salles d’opération, « la plus vaste entité en Europe » – qui peut être considérée comme un obstacle pour s’adapter aux évolutions rapides de la société, des technologies et de la médecine. « Les prises de décision sont complexes, les rivalités internes existent, et les changements prennent du temps à se mettre en place » reconnaissent-ils. Cependant, la taille de l’organisation peut être vue comme un avantage en temps de crise, suggèrent-ils : « Et cet avantage vient d’être démontré – Aucun manque de coordination, pas de fuites ou de retards, pas de limites atteintes. »
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