L’UTILISATION des tests rapides d’orientation diagnostique (TROD) par les non professionnels prévue dans le plan national de lutte contre le VIH/sida et les IST 2010-2014 a été saluée comme une « avancée considérable ». Aujourd’hui, au terme de deux appels à projets lancés par les autorités sanitaires en 2011 et en 2012, 63 projets associatifs ont reçu l’autorisation de réaliser ces tests. Le bilan des 9 premiers mois des actions de dépistage mises en place par l’association AIDES confirme la pertinence d’une telle offre. Entre le 1er janvier et le 30 septembre, les militants ont réalisé 12 695 tests dans 23 régions de France dont la Martinique, Saint-Martin et la Guyane.
« Hors les murs ».
Si 30 % de ces tests ont été effectués dans les locaux de l’association, la majorité l’a été (70 %) « Hors les murs ». Grâce à de nombreux partenariats, en particulier avec le SNEG (Syndicat national des entreprises gaies) ou le RAAC-SIDA (Réseau d’association africaines et caribéennes), les TROD peuvent être proposés dans les foyers, les lieux de rencontre en plein air, les saunas, les clubs, les sex-bars ou dans certains lieux d’affluence comme les gares RER, les marchés, les centres commerciaux. « On observe également une très bonne acceptabilité. Nous réalisons les tests hors les murs, dans la rue dans des camions ou des bus. Les personnes sont ravies », indique le président de AIDES Bruno Spire.
Par ailleurs 40 % des TROD réalisés ont concerné les homosexuels masculins, 30 % des hétérosexuels d’origine africaine et caribéenne, 30 % des hétérosexuels dits « caucasiens ». « Les personnes trans, les personnes consommatrices des produits psychoactifs et les travailleurs (euses) du sexe sont représentés dans les 3 catégories », précise l’association. La majorité des individus dépistés avaient plus de 30 ans.
Sur l’ensemble des tests, 1 % étaient positifs, un taux de séropositivité 5 fois plus élevé que dans l’offre de dépistage classique (0,2 %) et 3 fois plus important que dans les centres de dépistage anonyme et gratuit (CDAG). Parmi les homosexuels masculins, la proportion avoisine les 2 % (1,9 %) et elle culmine même à 3,5 % parmi les personnes qui cumulent les vulnérabilités comme les migrants gays originaires d’Afrique du Nord et d’Afrique subsaharienne.
30 % pour la première fois.
Une des réussites de la stratégie mise en place est de parvenir à toucher un public qui jusque-là échappait au dépistage. Les données de AIDES montrent que 30 % des personnes testées ne l’avaient jamais été auparavant. Là aussi, les pourcentages varient en fonction des communautés d’appartenance : 41 % des hétérosexuels d’origine africaine ou caribéenne ont déclaré faire le test pour la première fois (45 % chez les hommes) et 35 % des hétérosexuels dit « caucasiens ». Les homosexuels semblent eux plus familiarisés au dépistage (84 % avaient déjà fait le test).
Au vu de ces résultats l’association s’apprête à étendre son dispositif pour permettre à davantage de personnes de connaître leur statut. Un des atouts de ce dépistage réside « dans la proposition d’accompagnement personnalisé des personnes vers une prise en charge globale de qualité » et de ce fait, diminuer les perdus de vue. « Il faut faire reculer la sérophobie et les discriminations à l’égard des groupes à risque : les migrants, les usagers de drogues, les homosexuels. Avec la diminution des inégalités d’accès aux soins et du reste à charge, cela permettrait de diminuer le taux actuel de 30 % de perdus de vue », souligne Bruno Spire.
Hépatites et auto-tests.
L’élargissement du dispositif aux hépatites B et C constitue une « priorité absolue de santé publique » parmi les populations migrantes et les usagers de drogues. L’association appelle « le gouvernement à aller plus loin : il faut mettre en place au plus vite un cadre législatif permettant le test rapide démédicalisé des hépatites virales ». Un avis que partage, le Pr Jean-François Delfraissy (voir encadré) et le vice-président du Conseil national du sida (CNS), le Dr François Bourdillon « À la PASS bucco-dentaire de la Pitié nous avons réalisé des TROD VIH/VHC. Parmi les 60 premières personnes, 6 étaient positives pour le VHC et 0 pour le VIH. La réponse est claire, il faut le faire », explique-t-il au « Quotidien ».
Le vice-président du CNS salue cette nouvelle stratégie communautaire qui s’ajoute à la palette des outils de prévention. « Il faut que les pouvoirs publics continuent à soutenir cette stratégie mais il doit aussi renforcer le dépistage classique dans les CDAG et chez le médecin généraliste ». Selon lui, le dépistage reste un enjeu majeur de la lutte contre le VIH/sida. « Avec 6 000 nouvelles contaminations par an, l’épidémie est une épidémie dynamique. Il faut continuer à accompagner cette partie du plan dont l’objectif n’est pas totalement atteint : le nombre de tests de dépistage réalisé en France n’a augmenté que de 4 %. Il en faut beaucoup plus », poursuit-il.
Une nouvelle approche est d’ailleurs en cours d’examen : la mise à disposition des autotests. Deux avis du CNS et du CCNE sont en préparation à la demande de la Direction générale de la santé. D’ores et déjà le Pr Delfraissy explique qu’il y est favorable. « J’ai changé d’avis », confie-t-il au « Quotidien ».
L’Académie de médecine s’alarme du désengagement des États-Unis en santé
Un patient opéré avant le week-end a un moins bon pronostic
Maladie rénale chronique : des pistes concrètes pour améliorer le dépistage
Covid : les risques de complications sont présents jusqu’à trente mois après hospitalisation