Étude Séralini sur le maïs OGM

Le jugement sévère de six Académies

Publié le 22/10/2012
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Crédit photo : AFP

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« L’ORCHESTRATION de la notoriété d’un scientifique ou d’une équipe constitue une faute grave lorsqu’elle concourt à répandre auprès du grand public des peurs ne reposant sur aucune conclusion établie ». L’avis que publient aujourd’hui six Académies nationales - Médecine, Pharmacie, Sciences, Technologies, Vétérinaire, Agriculture - est sévère : l’étude du Pr Gilles-Éric Séralini sur la toxicité du maïs OGM NK 603 est contestable du point de vue de sa conception, de sa méthodologie, du choix des animaux utilisés et de l’interprétation des résultats.

« L’analyse statistique conventionnelle des résultats obtenus, tels qu’ils sont présentés dans l’article, montre qu’il n’y a pas de différence significative entre les groupes en ce qui concerne la survenue de tumeurs attribuable à l’OGM, au Roundup, ou à leur association, contrairement à ce que la formulation des auteurs de l’article laissait entendre au public », estiment les Académies.

En conséquence l’étude « ne permet aucune conclusion fiable ».

Un non-événement scientifique.

De plus, la manière dont elle a été diffusée constitue donc, aux yeux des Académies, « une faute grave ». Elles notent qu’il « est rare, en France, qu’un non-événement scientifique de cette nature suscite de telles passions jusqu’à mobiliser aussi rapidement les membres du Parlement ».

À propos de la communication choisie, les Académies s’interrogent sur la concomitance de la sortie de deux livres, d’un film et d’un article, avec l’exclusivité de leur contenu accordé à un hebdomadaire, assortie d’une clause de confidentialité « y compris vis-à-vis des scientifiques », soulignent les Académiciens. « Ces conditions de diffusion vers la presse, mise dans l’impossibilité de s’informer au préalable et donc sans possibilité de commenter en connaissance de cause, ne sont pas éthiquement correctes », jugent-elles.

L’avis soulève aussi la question d’un possible conflit d’intérêt compte tenu de ce que l’auteur G.E. Séralini et ceux qui l’entourent sont connus pour leur engagement écologique et des « soutiens financiers qu’ils ont obtenus par de grands groupes de distribution ».

Quant au fait d’être publié dans une revue internationale, les Académiciens rappellent que « la publication d’un article dans une revue à comité de lecture n’est pas, à elle seule, le gage de sa qualité scientifique ». Certains articles publiés dans les revues internationales, « y compris les plus réputées d’entre elles, sont parfois de qualité médiocre ou se révèlent inexacts a posteriori », affirment-ils. Ils se disent surpris de la façon dont l’article a été accepté par la revue « Food and Chemical toxicology ».

Enfin, les Académiciens sont prêts à admettre une ré-évaluation périodique « à l’aune de l’évolution des connaissances et du perfectionnement des techniques » des procédures adopter pour détecter toute éventuelle toxicité et/ou cancérogénicité des produits alimentaires.

Du crédit à l’expertise collective.

Les recommandations formulées par les Académies portent d’ailleurs toutes sur la communication des résultats scientifiques. Elles souhaitent que les universités et les organismes de recherche se dotent de règles éthiques concernant la diffusion aux journalistes et au grand public « afin d’éviter que des chercheurs privilégient le débat médiatique qu’ils ont délibérément suscité, à celui qui doit nécessairement le précéder au sein de la communauté scientifique ». Ils proposent que le CSA (Conseil supérieur de l’audiovisuel) s’adjoigne un Haut comité de la science et de la technologie et demandent aux pouvoirs publics et à la représentation nationale de tout mettre en œuvre pour redonner crédit à « l’expertise collective et à la parole de la communauté scientifique ».

 Dr LYDIA ARCHIMÈDE

Source : Le Quotidien du Médecin: 9178