Le 10 janvier 2018, la Haute autorité de santé a publié un guide de bonnes pratiques destiné à harmoniser la prise en charge des différentes formes d’insensibilité aux androgènes. Quelques jours plus tard, un groupement de personnes intersexuées, le Collectif Intersexe et allié.e.s, a réagi en dénonçant un guide qui, à ses yeux, « recommande des mutilations d’enfants intersexes ».
Des thérapies médicales et chirurgicales en question
De tels faits sont l’une des nombreuses manifestations d’un débat agitant actuellement nos sociétés : celui de la légalité des thérapies médicales et opérations chirurgicales réalisées dans les hôpitaux sur des personnes intersexuées, le plus souvent à la naissance, pour les assigner dans un sexe masculin ou féminin. L’an dernier les medias ont annoncé le dépôt par une personne intersexuée d’une plainte avec constitution de partie civile, dénonçant la réalisation de telles pratiques qualifiées de violences volontaires entrainant une infirmité ou une mutilation sur mineur de 15 ans, au sens de l’article 222-9 du code pénal.
Les personnes intersexuées — qualifiées par les médecins de personnes atteintes d’un désordre du développement sexuel — sont les personnes nées avec un sexe ne correspondant pas aux normes dominantes du masculin et du féminin. Considérées par la majorité du corps médical comme atteintes d’une maladie, au principal motif qu’elles ne rentrent pas dans les catégories de l’homme et de la femme, ces personnes sont, depuis la fin des années 60, soumises de manière massive à des actes chirurgicaux et hormonaux destinés à transformer leurs corps pour le « conformer » aux stéréotypes du masculin et du féminin.
Pour quels bénéfices ?
Jamais cependant, les professionnels de santé concernés n’ont pu prouver que ces actes médicaux apportaient un bénéfice thérapeutique à ces personnes par rapport à l’absence de traitement. Ils ne se sont jamais non plus sérieusement interrogés sur des méthodes alternatives plus douces (accompagnement psychologique, individuel, familial et social), ni demandés si ces « désordres du développement sexuel » étaient véritablement des maladies légitimant leur intervention. Marqués de l’idéologie de la seule binarité des sexes, ces professionnels n’ont en réalité pas cherché à soigner ces personnes mais à les faire rentrer dans des catégories qui ne leur correspondent pas. Ce faisant, ils se sont comportés moins comme des scientifiques que comme des militants de la binarité des sexes.
Les différentes actions médiatiques et judiciaires entreprises ces dernières années par les personnes intersexuées tentent de remettre en cause cette politique de santé. Plusieurs organisations protectrices des droits humains au niveau international et national ont condamné ces pratiques. En France, c’est notamment le Défenseur des droits, le Sénat, ou le Président de la République qui, d’une façon ou d’une autre, ont demandé l’arrêt de cette politique de santé.
Des actes irréversibles sans consentement éclairé
Force est de constater, néanmoins, que les choses évoluent bien lentement. Ainsi le guide de bonnes pratiques de la HAS, entre deux formules en apparence respectueuses du droit à l’intégrité physique des personnes intersexuées, continue à recommander la réalisation, pourtant sans nécessité médicale et sans consentement éclairé, de nombre d’actes irréversibles – gonadectomie, vaginoplastie, etc. – qui pourraient être qualifiées par les tribunaux de mutilations.
Au lieu d’attendre que nos hôpitaux et médecins soient condamnés par les tribunaux pour que cessent ces pratiques, prenons-les devant et profitons de la révision des lois bioéthiques pour rappeler la primauté du respect du corps humain et l’interdiction de la réalisation de toute intervention non consentie irréversible. Des propositions de réforme existent déjà en ce sens, il suffit de les porter.
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