DEUX JOURS APRÈS l’intervention radiophonique de Dominique Maraninchi sur RTL appelant à mettre fin aux prescriptions hors AMM de l’antiacnéique Diane 35 (et ses génériques) en contraception, l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) a pris de court les professionnels de santé en annonçant mercredi dernier la suspension de ces produits (effective dans un délai de trois mois). Dans sa décision, l’agence du médicament considère que « le rapport bénéfice/risque de Diane 35 et de ses génériques » s’avère être « défavorable dans le traitement de l’acné, au regard notamment du risque thromboembolique veineux et artériel auxquels ils exposent les femmes traitées ». Sur la base des données pharmaco-épidémiologiques, l’ANSM souligne que ce risque est multiplié par quatre « chez les femmes recevant Diane 35, par rapport aux femmes ne prenant ni Diane, ni contraception orale ». En outre, « l’usage important de ces médicaments en tant que contraceptifs n’est pas conforme et leur efficacité comme contraceptifs n’a pas été démontrée par des études cliniques appropriées », souligne l’ANSM qui demande aux médecins de « ne plus prescrire ces médicaments, ni en initiation de traitement, ni en renouvellement ».
Présidente de la Fédération nationale des collèges de gynécologie médicale (FNCGM), le Dr Michele Scheffler ne cache pas sa surprise. « L’ANSM nous avait réunis trois jours auparavant pour discuter des modalités de prescription des pilules de troisième et quatrième générations. Jamais une suspension de Diane 35 n’a été évoquée. Nous regrettons une décision arbitraire, abrupte et sans aucune concertation alors que celle-ci était jusque-là bien engagée », déclare-t-elle.
Une étude et des fuites.
Contactée par le « Quotidien », l’ANSM se défend d’avoir agi dans la précipitation. Cette décision relève du cadre général de réévaluation du bénéfice/risque des produits commercialisés avant 2005. Dans le cas de Diane 35, ce travail a débuté en juillet 2011 avec une demande de l’AFSSAPS formulée au laboratoire Bayer pour obtenir des données sur l’efficacité du produit dans le domaine de l’acné et de la contraception. Après avoir reçu des informations de la firme en décembre de cette même année, l’agence devenue ANSM a mis le dossier Diane 35 de côté. Dans un contexte de scandale médiatique autour des pilules de troisième et quatrième générations, l’agence du médicament a rouvert ce dossier dans une « ambiance de pression et de crise sanitaire », comme l’a reconnu mercredi dernier face à la presse Dominique Maraninchi.
Après avoir consulté des experts dermatologues sur les bénéfices « modérés » de Diane 35 et ses génériques dans le traitement de l’acné, l’ANSM a ensuite fait un point sur les risques liés à ce médicament. Tout s’est accéléré dès lundi dernier, lors d’une réunion à Saint-Denis, au siège de l’ANSM où les responsables des 31 centres de pharmacovigilance ont notamment évoqué le cas Diane 35. À cette occasion, le Pr Christian Riché, directeur du centre de pharmacovigilance de Brest a discuté avec ses confrères des résultats de l’enquête PMSI réalisée au CHU de Brest qui met en évidence un surrisque de d’événement thromboembolique veineux (ETV) chez les patientes sous Diane 35 ou l’un ses génériques.
Pour le Pr Riché, cette enquête PMSI n’a pourtant pas été déterminante dans la décision de suspension du médicament prise mardi, en début de soirée par le directeur général de l’ANSM. Toutefois les fuites dans la presse autour de cette étude PMSI auront vraisemblablement eu un impact. Selon le responsable du CRPV brestois, la décision de l’ANSM émane surtout des données épidémiologiques et de « l’embarras » de l’agence lié aux prescriptions de ces produits étiquetées « hors AMM » ( 54 % des généralistes et 75 % des gynécologues d’après un panel IMS Health). « Alors qu’on était en train de réfléchir sur une meilleure prescription des pilules, une meilleure rationalisation des prescriptions entre les deuxième et troisième génération, il y avait au milieu ce médicament - Diane 35 - qui entraînait une certaine confusion dans une réflexion qui a besoin d’être raisonnable et raisonnée sur le bon usage et le respect des précautions d’emploi et des contre-indications », commente le Pr Riché.
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