TOUS LES ACTES violents des mineurs ne doivent pas être considérés de la même manière, estime Maurice Berger. Le pédopsychiatre fait la différence entre deux sortes de violence, « au strict minimum ». L’incivilité, d’une part, quelle que soit sa gravité, « mais dans laquelle il n’y a pas d’atteinte aux personnes ». « Brûler une école ou une voiture est la manière de s’amuser de ces jeunes : ils ne savent pas jouer en faisant semblant, car leurs parents n’ont jamais joué avec eux dans leur jeune âge. Mais cela ne veut pas dire qu’ils feront plus tard des atteintes aux personnes ».
Il y a, d’autre part, le domaine des violences aux personnes pouvant aller jusqu’à la mort. « Ce sont souvent des enfants qui ont été soumis eux-mêmes à des traumatismes psychiques répétitifs avant l’âge de 2 ans, ce qu’on appelle la pathologie des traumatismes relationnels précoces, et qui ont mis en eux la violence d’adulte. » Cette violence, ils ont pu la subir directement mais également y assister, à travers les violences conjugales. « Actuellement, dans notre service, nous avons en moyenne sur l’année 60 % de mineurs d’origine maghrébine qui sont très violents et qui ont tous été soumis au spectacle de leur mère sévèrement battue par leur père », ajoute le praticien.
Si l’incivilité « peut être accessible à une prévention ou à une aide parentale », face à une violence subie répétitivement, il faut au contraire « décider rapidement un placement pour protéger le développement affectif de l’enfant ». Selon Maurice Berger, la loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l’enfance n’est pas à la hauteur des enjeux. « Actuellement, la protection des enfants consiste en une aide à la parentalité d’intensité insuffisante. Sans axe directeur, elle évalue mal la dangerosité affective des situations dans lesquelles vivent les enfants. Quand les parents ne sont pas aidables, le dispositif ne place pas suffisamment tôt, ce qui ne signifie pas forcément placer plus d’enfants », nuance-t-il.
La contenance.
Au niveau de la prise en charge, il déplore qu’« en France, on ne pense qu’en termes d’éducation ou de répression : il nous manque un troisième axe fondamental qui est la contenance. Cette contenance consiste à empêcher un individu d’exercer des actes violents mais en même temps à écouter ce qu’il ressent, car c’est alors qu’il commence à penser au lieu d’agir. Dans notre service, on isole ou on contient parfois des jeunes. Mais on est à côté d’eux toutes les demi-heures pour les écouter. C’est comme ça qu’ils progressent. »
Le Dr Berger souligne, par ailleurs, la constante confusion entre « autorité et abus d’autorité », relayée par les médias. « On sait que le psychisme de l’enfant a besoin de rencontrer une autorité pour s’organiser, pour ne pas être livré à ses pulsions. Mais dès que quelqu’un manifeste publiquement la nécessité de l’autorité, d’imposer des limites, il est tout de suite taxé d’excès d’autorité ou de vouloir retourner à "l’ordre moral" ». Il déplore que les efforts pour construire « une autorité saine » dans l’espace public soient systématiquement tournés en dérision.
Concernant la violence scolaire, Maurice Berger s’étonne « qu’on n’en ait pas parlé plus tôt. Actuellement nous n’avons plus aucun espace public qui ne soit pas contaminé par la violence. Dans le service, nous accueillons aussi des enfants non violents qui ont une personnalité fragile. À Saint-Étienne, pour eux, on ne trouve presque plus de classes calmes parmi les classes d’inclusion scolaire (CLIS) en primaire ou, en secondaire, les sections d’enseignement général et professionnel adapté (SEGPA). On demande aux enseignants de régler les problèmes de la société. Mais ce n’est pas leur fonction. Leur travail, c’est de faire de la pédagogie adaptée, ce qui est déjà difficile, et d’apprendre aux enfants à vivre en groupe. C’est pour cela que je suis totalement d’accord avec l’apprentissage de la morale, qui vise à rétablir l’identification à autrui. Le rôle des enseignants ne consiste pas à éduquer des enfants violents. C’est, en premier lieu, le rôle des parents ».
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