La corrélation entre le changement climatique et les maladies rénales n’est pas encore identifiée en France, ni par les généralistes, ni par les néphrologues eux-mêmes, regrette la Pr Maryvonne Hourmant (CHU de Nantes), ex-présidente de la société francophone de néphrologie, dialyse et transplantation (SFNDT). « On ne l’a pas encore clairement observée dans la pratique hospitalière, en dehors des périodes caniculaires qui entraînent des déshydratations aiguës avec des lésions rénales chez les plus fragiles que sont les jeunes enfants, les personnes âgées, ou les patients diabétiques. »
Les reins cibles du réchauffement.
Mais plusieurs études statistiques ont établi que les reins étaient bien les cibles du réchauffement : d’après « The Lancet Regional Health-Americas » (2017), 7,4 % des hospitalisations liées à des pathologies rénales sont attribuables à la hausse des températures et en 15 ans, celle-ci a causé plus de 202 000 cas de maladies rénales au Brésil, un pays où, pour chaque augmentation de 1 degré Celsius de température moyenne quotidienne, il résulte une hausse de 1 % des maladies rénales.
Des néphropathies mésoaméricaines, sri lankaises, ou d’origine inconnue sont décrites en Amérique centrale et en Asie, en lien étroit avec le réchauffement et elles touchent surtout des jeunes qui travaillent en extérieur, présentant une baisse de la filtration glomérulaire, une protéinurie minime et une néphrite tubulo-interstitielle (Environnemental Health, 2017).
La France est concernée, avec les personnes qui travaillent dans les vignes, comme l’a montré le Dr Marc De Broe. Et il faut se préparer à la multiplication des lésions rénales sous l’effet de la déshydratation et des insuffisances rénales fonctionnelles qu’elle entraîne, comme de la hausse de la température corporelle et des lésions directes qui s’ensuivent sur les cellules. La montée des maladies infectieuses transmises par les rongeurs (hantavirus, leptospirose) génère encore des insuffisances rénales aiguës.
Création du groupe de la néphrologie verte.
Constatant que la dialyse était le traitement qui impacte le plus l’environnement, la Pr Hourmant a créé en 2020 au sein de la SFNDT, le groupe « néphrologie verte ». « On consomme et rejette 380 litres d’eau pour chaque séance de chacun des 50 000 dialysés français, souligne-t-elle. Et une année d’hémodialyse pour un patient consomme autant d’énergie que celle nécessaire à toute une famille sur un an. Nous invitons donc tous les établissements à faire mesurer leur empreinte carbone, c’est le préalable nécessaire à une démarche de développement durable. J’ai moi-même sollicité sur ce sujet la direction du CHU de Nantes, en envoyant de nombreux mails qui n’ont jamais obtenu de réponse. Nous nous heurtons à des mammouths difficiles à faire avancer ! »
Mais nous multiplions les initiatives avec des webinaires et des réunions en marge de nos congrès, les nouvelles générations nous rejoignent, se félicite la Pr Hourmant, qui salue l’engagement sur la question climatique du Club des jeunes néphrologues.
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