Expositions environnementales, un nouvel enjeu

Mésothéliome, la prévention encore nécessaire

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Publié le 07/05/2020
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L'incidence du mésothéliome malin continue d'augmenter en France, notamment chez les femmes avec un doublement des cas depuis 1998.
Une problématique qui s'est déplacée vers des métiers d'intervention

Une problématique qui s'est déplacée vers des métiers d'intervention
Crédit photo : Phanie

« Le sujet de l'amiante est et restera encore pendant plusieurs décennies un sujet majeur de santé publique, de santé au travail et de santé environnementale », annonce l'un des articles du « Bulletin Épidémiologique Hebdomadaire » consacré à la surveillance des mésothéliomes en France.

Santé publique France (SPF) révèle en effet une augmentation de l'incidence depuis 1998, avec 1 100 nouveaux cas annuels en 2015-2016, et ce « malgré l'interdiction de l'usage de l'amiante en 1997 et du fait de l'effet différé de 30 à 40 ans entre la première exposition et le diagnostic », est-il souligné. Au-delà de la prévention de l'exposition professionnelle toujours d'actualité, de nouveaux enjeux se font jour avec l'émergence du poids des expositions environnementales.

Le Programme national de surveillance du mésothéliome pleural (PNSM) mis en place en 1998 dresse, à ce sujet, un constat troublant : l'augmentation est encore plus marquée chez les femmes avec un doublement de l'incidence.

Le BTP toujours touché

Pour les hommes, si plus de 90 % d'entre eux restent exposés professionnellement à l'amiante au cours de leur carrière, la problématique s'est déplacée des métiers d'utilisation et de transformation de l'amiante vers des métiers d'intervention sur des matériaux contenant de l'amiante (BTP, désamiantage, etc.).

Chez les femmes, en revanche, la part des expositions professionnelles à l'amiante reste faible (environ 40 %) et 35 % d'entre elles ont été exposées en dehors du travail. Il s'agit le plus souvent d'expositions via le fait de résider avec des conjoints ou parents exposés professionnellement (20,7 %), d'expositions domestiques ou via le bricolage. Pour un quart des femmes, aucune de ces expositions n'est retrouvée.

De plus, le BEH alerte sur le fait que le recours aux dispositifs d'indemnisation, qu'il s'agisse de la reconnaissance en maladie professionnelle ou du fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (Fiva), est insuffisant. Un quart des patients relevant du régime général de la Sécurité sociale (RGSS) ne fait aucune démarche et plus de la moitié de ceux hors RGSS n'a pas recours au Fiva.

Un nouveau dispositif en 2021

Pour SPF, ces résultats plaident en faveur d'un renforcement nécessaire de la prévention sur le « risque amiante » : tant auprès des travailleurs des secteurs du BTP (où la perception du risque est encore faible) et des jeunes en formation de ces secteurs, qu'auprès des professionnels de santé et de la population générale. L'information doit porter notamment sur les risques liés au bricolage, les expositions à proximité des bâtiments vétustes, dégradés ou agricoles mais aussi les expositions extraprofessionnelles (fréquentation des bâtiments contenant de l'amiante tels que lieux de travail, écoles).

La surveillance des mésothéliomes va se poursuivre, avec la mise en place en 2021 d'un dispositif national de surveillance des mésothéliomes intégrant le PNSM et la déclaration obligatoire. L'objectif affiché est de « moderniser » et d'optimiser cette surveillance, mais aussi de « l'adapter aux nouveaux enjeux », notamment mieux comprendre les expositions environnementales chez les femmes et les hommes jeunes.

 

BEH, n°12, 28 avril 2020

Dr Irène Drogou

Source : Le Quotidien du médecin