LE QUOTIDIEN - Depuis lundi, internes et chirurgiens du privé sont mobilisés, soutenus par une trentaine d’organisations professionnelles. Comment expliquer ce mouvement de grogne ?
NORA BERRA - Cette colère médicale va bien au-delà de l’avenant 8 sur les dépassements d’honoraires, mis en avant par les contestataires. Les médecins sont dans un climat de défiance. Ils se sentent stigmatisés par l’actuel gouvernement, avec qui la relation de confiance a été rompue. Marisol Touraine ne fait que passer en force les mesures qu’elle entend porter au nom des promesses de campagne de François Hollande. Sa démarche revient à opposer le secteur public au secteur privé, fondamentaux autant l’un que l’autre à la médecine française. Le drame de cette rupture de confiance s’illustre avec les internes : Mme Touraine a beau répéter qu’elle ne mettra pas fin à la liberté d’installation, les internes ne veulent pas la croire ! Moi, les internes, je les recevais chaque mois pour travailler sur le chantier de la médecine de proximité, la formation des médecins, le déploiement des maîtres de stage dans les cabinets libéraux, etc.
Les grandes déclarations de Mme Touraine ne suffisent plus. Derrière les mots, il faut des actes.
Mais ne peut-on dire que Marisol Touraine a réussi avec le contrat d’accès aux soins là ou vous avez échoué avec le secteur optionnel ?
Absolument pas ! Nous avions abouti à un accord. Alors que l’ensemble des représentants de professionnels avait signé, la Mutualité, par posture politicienne et par idéologie – nous étions en campagne présidentielle –, a déserté la table des négociations. Nous proposions un secteur intermédiaire avec l’engagement pour les médecins de secteur II d’avoir une activité en secteur I de 30 % et de limiter leurs dépassements à hauteur de 150 %. La démarche était volontaire et seules la chirurgie, l’anesthésie et la gynécologie étaient concernées. Mme Touraine, elle, instaure des mesures coercitives conventionnelles pour ceux qui ne respectent pas le contrat. Discriminant, l’avenant 8 vise toutes les spécialités.
Le bilan des six premiers mois de la ministre est-il aussi sombre que le suggère l’actualité ?
Mme Touraine manque de vision à long terme. Elle n’a ni stratégie, ni plan d’action. Dès son arrivée aux responsabilités, elle a déclaré à l’emporte-pièce vouloir mettre fin à la convergence tarifaire public-privé sans réflexion aucune, sans se poser la question de l’impact sur l’offre de soin. C’est une erreur. Cela permettait de gagner en qualité et en sécurité des soins tout en veillant à ce que les coûts ne soient pas démesurés. Et en mettant en place missions (Couty, Laurent) et nouveaux groupes de travail, Madame Touraine méprise et détricote les multiples travaux sérieux conduits ces dernières années.
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