Des traces d'une forme de polio dérivée d'une souche vaccinale ont été retrouvées dans des échantillons d'eaux usées prélevés dans une station d'épuration à Londres, ont annoncé l'Organisation mondiale de la santé (OMS) et les autorités britanniques ce 22 juin.
« Il est important de noter que le virus a été isolé uniquement dans des échantillons environnementaux - aucun cas associé de paralysie n'a été détecté », a indiqué l'OMS dans un communiqué.
Extrêmement contagieuse, la poliomyélite envahit le système nerveux et peut causer une paralysie permanente. Si le poliovirus sauvage est la forme la plus connue du poliovirus, une autre forme de poliovirus peut se propager au sein des communautés : le poliovirus circulant dérivé d'une souche vaccinale, ou PVDVc. Rares, ces PVDVc sont devenus plus fréquents au cours des dernières années en raison des faibles taux de vaccination au sein de certaines communautés. Les PVDVc de type 2 (PVDVc2) sont les plus répandus, selon l'Initiative mondiale pour l'éradication de la poliomyélite : 959 cas ont été confirmés dans le monde en 2020.
Propagation probablement localisée dans le nord-est de Londres
L'agence britannique de sécurité sanitaire a, elle, indiqué que les « isolats » avaient été retrouvés dans de multiples échantillons d'eaux usées prélevés dans une station d'épuration de Londres entre février et juin. Cette station couvre une large zone dans le nord et l'est de la capitale britannique, où vivent 4 millions d'habitants.
« Ces résultats suggèrent qu'il peut y avoir une propagation localisée du poliovirus, très probablement chez des personnes qui ne sont pas à jour de leur vaccination contre la polio », explique Kathleen O'Reilly, spécialiste de la polio.
Ces dernières années, une moyenne de 1 à 3 isolats de poliovirus par an a été détectée dans des échantillons d'eaux usées au Royaume-Uni. Mais ces isolats n'avaient aucun lien entre eux. Dans le cas présent, indique l'agence britannique « les isolats (...) sont génétiquement liés », rendant nécessaire d'étudier la transmission de ce virus dans le nord-est de Londres.
Selon les autorités britanniques, le scénario le plus probable est qu'un individu récemment vacciné soit entré au Royaume-Uni avant février en provenance d'un pays où le vaccin antipoliomyélitique oral (VPO) a été utilisé lors de campagnes de vaccination.
Alors que le Royaume-Uni a cessé d'utiliser le VPO en 2004 (un vaccin inactivé injectable l'a remplacé), plusieurs pays, dont le Pakistan, l'Afghanistan et le Nigeria, ont continué à utiliser le VPO contenant le virus de type 2 pour contrôler des épidémies. Le VPO est conçu à partir d'une forme atténuée du poliovirus vivant qui « nous immunise en se développant dans l'intestin pendant une courte période au cours de laquelle il peut être détecté dans les selles », explique Nicholas Grassly, professeur à l'Imperial College de Londres. « Ce virus peut occasionnellement être transmis et très rarement il (...) peut provoquer une épidémie de poliovirus dérivé du vaccin », indique-t-il.
Appel à la vigilance de l'OMS
L'OMS juge « important que tous les pays, en particulier ceux qui ont un volume élevé de voyages et de contacts avec les pays et zones touchés par la polio, renforcent la surveillance afin de détecter rapidement toute nouvelle importation de virus et de faciliter une réponse rapide ». « Toute forme de poliovirus, où qu'elle se trouve, constitue une menace pour les enfants du monde entier », rappelle l'instance internationale.
De son côté, la France est toujours dans l'attente de la mise en place du projet SUM'EAU (Surveillance microbiologique des eaux usées), dispositif national sous pilotage de la Direction générale de la santé et de la Direction de l’eau et de la biodiversité, en lien avec Santé publique France et l'Anses. Il devait notamment intégrer (à l'automne 2021) l’Observatoire épidémiologique des eaux usées (Obépine), créé au printemps 2020 par trois groupes de recherche, pour traquer le Sars-CoV-2 dans les eaux usées. Un retard dont s'est plusieurs fois émue l'Académie de médecine.
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