Le procès de l’affaire des prothèses mammaires PIP a repris lundi devant le tribunal correctionnel de Marseille avec l’audition des inspecteurs de l’agence des produits de santé, l’AFSSAPS devenue ANSM. L’AFSSAPS (devenue depuis l’ANSM) avait alors été alertée par des chirurgiens sur des ruptures de l’enveloppe des implants PIP bien plus fréquentes que chez les autres fabricants.
L’agence décide d’un contrôle mais prévient l’entreprise. La dernière inspection remontait à juin 2001, soit au début de la fraude reprochée à PIP. « On a prévenu la société car on n’était pas du tout dans un contexte de suspicion de fraude, on venait pour comprendre l’origine des ruptures », raconte Jean-Christophe Born, 47 ans, ingénieur chimiste salarié de l’AFSSAPS qui participe à l’inspection.
Du 16 au 18 mars 2010, deux inspecteurs 2 inspecteurs de l’agence, Jean-Christophe Born et Thierry Sirdey se rendent donc dans les locaux de Poly implants prothèses à Six-Fours-Les-Plages et La Seyne-sur-Mer. Ils ont en leur possession une photo de fûts d’huiles de silicone non déclarées, en provenance du site varois. La première journée, qui « se passe bien », est consacrée à l’étude du dossier de conception des prothèses et à la visite des locaux de production, qui « avaient l’air tout à fait normaux », poursuit le témoin. Mais le lendemain, à La Seyne, les inspecteurs de l’AFSSAPS aperçoivent, depuis l’extérieur du site, des conteneurs portant l’étiquette d’une matière première qu’ils ne connaissent pas. Ils passent les grilles de l’usine et s’en approchent, mais « les étiquettes avaient disparu sur les fûts, alors qu’on les avait vues depuis l’autre côté de la clôture quelques minutes plus tôt ».
Une fraude organisée
Les deux inspecteurs finiront par retrouver des étiquettes de Silop, une huile de silicone de grade industriel et non médical qui servait à fabriquer le gel maison contenu dans les implants, à la place du gel déclaré de marque Nusil. Interrogés à l’époque sur l’utilisation des matières premières non déclarées, Jean-Claude Mas, le fondateur de PIP, et le directeur du développement de l’usine répondent alors qu’elles ont servi à produire un millier d’échantillons. « On avait évalué la quantité à neuf tonnes. Pour mille échantillons, soit neuf kilos par implant, ça faisait beaucoup », ironise Jean-Christophe Born.
« Donc, dans un premier temps, il n’y a pas eu de collaboration de PIP, on a cherché à vous cacher la vérité ? », l’interroge la présidente du tribunal, Claude Vieillard. « Exactement », répond le témoin, ajoutant que selon lui, le personnel de PIP rencontré alors « était très compétent ».
« Comment se fait-il qu’entre 2001 et 2010, il y ait eu seulement deux visites à La Seyne? », interroge Me Yves Haddad, l’avocat de Jean-Claude Mas. En 2001 avait été signalé un problème sur un lot d’implants qui contenait le bon gel - Nusil - mais dont le ratio de composition n’était pas conforme. Ensuite, « on n’a pas eu de signal sur le fonctionnement de PIP », répond Jean-Christophe Born. « Qu’est-ce qui fait qu’il a fallu attendre de trouver ces fûts pour savoir ? », demande alors le vice-procureur, Ludovic Leclerc.
« C’était bien dissimulé, il était très difficile de mettre le doigt dessus. Il n’est pas sûr que sans ces photos, j’aurais trouvé », admet l’inspecteur, pour qui cacher la vérité à TÜV, qui procédait à des audits dans le Var tous les ans, a dû nécessiter « une belle organisation ». C’est cette « fraude organisée » a conduit le parquet à considérer le certificateur allemand comme une victime de la tromperie de PIP ce que regrette les victimes.
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