CCMF (Centre catholique des médecins français), JMC (Jeunes médecins chrétiens), AFPC (Association française des pharmaciens catholiques), ACMSS (Action catholique des milieux sanitaires et sociaux) ont réuni leurs cadres pour une première, dimanche, au sein de la Conférence chrétienne des associations de professionnels dans la santé. Les divers témoignages exprimés lors des forums par quelques centaines de participants, à l’amphi Charcot de l’Hôpital de la Pitié-Salpêtrière, concordent, avec un diagnostic commun, posé tant par les médecins que les infirmières, aides soignantes, pharmaciens et assistantes sociales : il est urgent de réinventer le dialogue « dans un système qui, insiste Jacques Faucher, médecin et aumônier accompagnateur, pousse à la fatigue, à l’erreur, à la faute, force au chacun pour soi et à la fuite. Rien que la semaine dernière, encore deux affaires ont éclaté dans des maternités qui mettent en accusation les professionnels, alors que c’est l’ensemble du système qui est en cause ».
Protocoliser la compassion.
« Le saucissonnage de la prise en charge, avec une parcellisation du savoir nous enferme dans nos tours d’ivoire, que nous soyons hospitaliers ou libéraux », note un généraliste. « Cela fait trente ans qu’on se plaint de pas communiquer entre professionnels, constate une infirmière, nous n’avons pas de lieu pour nous rencontrer. »« Nous sommes envahis au quotidien par des procédures chronophages d’évaluation, remarque encore une psychiatre de l’Orne, quand est-ce qu’on va protocoliser la compassion ? »
Pour le Dr Bernard Guillotin (CCMF), alors que 20 % des praticiens ont déclaré un médecin traitant pour eux-mêmes, « le burn out est un phénomène massif, qui progresse aussi bien en ville qu’à la campagne, chez les hospitaliers comme chez les libéraux et, avec ses marqueurs d’addictions et d’asthénie, le surmenage, l’isolement professionnel, les blessures narcissiques l’alimentent. Il est grand temps de le reconnaître comme maladie professionnelle. »
« La plupart des intervenants ont eu besoin d’exprimer leur souffrance, estime le Dr Luc Stuit (JMC), dans une démarche un peu cathartique, mais ils sont désireux de changer aussi leur regard, avec des initiatives nouvelles ». Comme dit Bruno Cazin, PH à Lille (hématologue) et vicaire épiscopal, « notre système est appauvrissant parce qu’il est de plus en plus rempli de protocoles, gages d’une meilleure efficacité, certes, mais aussi générateurs de contraintes en temps. Les médecins doivent apprendre à habiter celles-ci dans de nouveaux espaces de liberté et de créativité. Il faut résister au temps contraint. »
C’est le sens de la démarche proposée par exemple par le Dr Élisabeth Didier et le laboratoire d’éthique du CHU de Tours. « Nous avons créé des groupes de paroles, explique-t-elle, où chacun relate ses expériences, non pas comme une histoire clinique parmi d’autres, mais pour faire émerger un sujet. »
Autre exemple évoqué à la tribune, la fédération bretonne interprofessionnelle de santé (lire ci-dessous). Là aussi, un maître mot revient : partenariat. Évêque accompagnateur de la pastorale de la santé, Mgr Michel Guyard l’explicite lors de la célébration finale : « Dans un monde où la complexité des problèmes et des peurs latentes risquent de conduire à la défense de ses intérêts particuliers, il est urgent d’oser la rencontre pour ouvrir de nouveaux espaces au service du bien commun, le vrai service qui donne la possibilité de vivre ensemble. Dans des structures fortement hiérarchiques, il faut aujourd’hui conjuguer la complexité pyramidale avec des réseaux horizontaux de partenariat impliquant les divers professionnels. »
« C’est une démarche qui ne saurait bien sûr se limiter à des associations confessionnelles, souligne le Dr Bertrand Galichon, président du CCMF, les médecins doivent s’engager dans des réseaux ouverts à toutes les sensibilités. » Concluant cette première rencontre nationale dont il a été l’instigateur, Jacques Faucher, fait remarquer au passage que « les questions bioéthiques n’ont pas été abordées, tant il est vrai que, pour les médecins chrétiens, la santé n’est pas que la bioéthique, de même que l’embryon n’est pas à lui seul le sujet de la bioéthique. »
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