Sarkozy face au manichéisme

Publié le 17/02/2012
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Crédit photo : AFP

Dans ces conditions, affirmer que, de toute façon, il n’avait rien à dire parce qu’il est plombé par son bilan, c’est étouffer le débat, ignorer la forte fraction de la population qui le soutient (10,7 millions de téléspectateurs) et condamner l’accusé avant le procès. On ne peut pas à la fois reconnaître la violence des deux crises survenues pendant le quinquennat et lui attribuer la hausse du chômage, le déficit extérieur et l’énormité de la dette. On ne pouvait pas à la fois exiger de lui qu’il s’engageât plus tôt et considérer sa déclaration de candidature comme un non-événement. On ne peut pas à la fois déclarer qu’il sera forcément battu et crier hou ! hou ! à chacune de ses propositions.

Sincère ou non, Nicolas Sarkozy affirme qu’il a pris sa décision il y a plusieurs semaines. Il est évident que, s’il avait renoncé à un second mandat, il devait l’annoncer à la fin de l’année dernière peut-être pour organiser une primaire, en tout cas pour laisser à un autre homme le temps de s’organiser et de porter les couleurs de la droite. On peut dire ce qu’on veut de lui, son plus grand défaut n’est pas l’irresponsabilité. Depuis que François Hollande fait la course en tête, et cela fait plusieurs mois, on s’est posé la question de la viabilité du candidat Sarkozy. Mais comment faire ? Abandonner n’aurait pas seulement été de la lâcheté, mais l’humiliante reconnaissance d’une très grande impopularité. Si vous interrogez les gens dans la rue, ils vous diront souvent que le chômage, la dette, la baisse du pouvoir d’achat et les hausses d’impôts, c’est Sarkozy. Ils supposent que M. Hollande va réparer tous les dégâts causés par le président sortant, sans comprendre vraiment que la plus belle fille du monde ne peut donner que ce qu’elle a et que les moyens que le chef de la gauche mettra en œuvre contre les effets de cette crise pourraient ne pas être efficaces ou pourraient même les aggraver, si on tient compte des nouvelles dépenses que M. Hollande s’apprête à faire.

En réalité, les jugements portés sur le président-candidat étouffent le débat politique. Son slogan, « Une France forte », n’est pas mauvais du tout. Car il laisse entendre que nous réussirons collectivement en mettant un terme aux déficits publics et non en inventant de nouvelles dépenses. Nous pourrions même surprendre le reste du monde en accélérant le désendettement, si nous en avons la volonté. Ce qui demande plus de sacrifices et ne plaît pas aux gens. Le débat de fond sur la dette et la fiscalité devient très vite technique. Il passe au-dessus de la tête de l’électorat. Plus que les jugements négatifs de la presse, c’est ce qui menace la candidature de Sarkozy, contraint de poursuivre, sans trop le dire, une politique impopulaire.

RICHARD LISCIA

Source : lequotidiendumedecin.fr