Le « Bulletin épidémiologique hebdomadaire » publie les résultats de l’étude Abena (Alimentation et état nutritionnel des bénéficiaires de l’aide alimentaire) sur la situation des femmes ayant recours à l’aide alimentaire dans six territoires urbains français en 2011-2012 : Paris, Marseille, Grand-Dijon, Seine-Saint-Denis, Val-de-Marne et Hauts-de-Seine.
Sept ans après la première étude de 2004-2005, les résultats confirment que les femmes de cette population sont exposées à un risque particulièrement élevé de surpoids et d’obésité. En effet, 36,4 % étaient en surpoids contre 23,8 % en population générale et 35,5 % étaient obèses contre 23,8 % en population générale (71,9 % sont soit en surpoids, soit obèses).
Familles monoparentales
Dans cette population recourant à l’aide alimentaire, non seulement la prévalence de l’obésité est « exceptionnellement » élevée mais elle s’aggrave (35,4 % versus 29 % en 2004).
Dans un éditorial, le Pr Arnaud Basdevant, de l’Institut de cardiométabolisme et nutrition (hôpital de la Pitié-Salpêtrière, Paris) souligne que ces données « inédites » et très attendues « interrogent la santé publique ». L’analyse des chercheurs* montre que l’obésité n’est pas tant une maladie de la société d’« abondance » qu’une maladie de la « vulnérabilité sociale ». Le risque d’obésité est associé au niveau scolaire, à l’absence de couverture complémentaire d’assurance-maladie, au type d’aide alimentaire, le lieu de résidence et la situation familiale. Comparées à la population générale, les femmes bénéficiant de l’aide alimentaire sont plus jeunes, ont plus fréquemment des enfants à charge qu’elles élèvent le plus souvent seules (42 % de familles monoparentales contre seulement 8 %). « La présence d’enfants dans le ménage peut conduire les mères, en cas d’insécurité alimentaire (lorsque l’accès à des aliments sûrs et sains, et en quantité suffisante, est compromis), à adopter des habitudes alimentaires défavorables pour la santé », assurent Dorothée Grange et coll.
Insécurité alimentaire, une notion méconnue
L’insécurité alimentaire est analysée par Katia Castetbon dans un second article du « BEH ». Les auteurs observent que cette insécurité mesurée au moyen du questionnaire « US Household Food Security Survey Module » est « sévère » dans 43,4 % des cas et présente de manière « modérée » dans 31,4 % des cas. La présence d’enfants à charge est associée à un niveau d’insécurité alimentaire plus élevé, indépendamment des autres facteurs étudiés. Dans son éditorial, le Pr Basdevant regrette que ce concept d’insécurité alimentaire soit « peu étudié » et « peu reconnu par la communauté des sciences sociales » française. Cet enfant l’insécurité ressentie et vécue qui pousse les mères à choisir en priorité l’alimentation de leurs enfants, avec pour conséquence un déséquilibre nutritionnel plus important pour ce qui les concerne.
Mauvaise santé bucco-dentaire
Catherine Vincelet et coll. montrent que l’état de santé bucco-dentaire des femmes bénéficiant de l’aide alimentaire et obèses est moins bon avec entre 5 et 14 dents absentes non remplacées chez 18,3 % d’entre elles. Si l’association positive entre la maladie parodontale et l’obésité est consensuelle, celle entre obésité et perte dentaire l’est moins mais la recherche dans le domaine est en plein essor. « Des pistes microbiologiques passionnantes sont avancées », suggère le Pr Basdevant.
Enfin, l’étude Abena a permis de confirmer les liens entre obésité et troubles du sommeil, notamment dans les populations précaires. Plus d’une femme sur 10 (11,6 %) avait un temps de sommeil total très court (TST ‹ 5 heures) avec une prévalence de l’obésité plus élevée (55,6 % chez les femmes ayant un TST ‹ 5 heures contre 32 % pour celles ayant un TST ≥ 5 heures).
* De l’Unité de surveillance et d’épidémiologie nutritionnelle (Institut de veille sanitaire-Université Paris 13), de l’Équipe de recherche en épidémiologie nutritionnelle (Centre d’épidémiologie et biostatistique Sorbonne Paris Cité), de l’Observatoire régional de santé Île-de-France et de l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES).
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