IL NE FAIT aucun doute que les clandestins tunisiens n’ont pour objectif que d’aller en France où ils ont souvent de la famille, et que la plupart parlent le français, ce qui, en dépit de notre taux de chômage élevé, devrait, selon leurs dires, leur permettre de trouver des emplois. Cet afflux massif entre en collision avec une politique d’immigration que le gouvernement français ne cesse de durcir, certes pour des raisons électorales mais aussi parce qu’il ne peut y avoir de bonne immigration qui ne soit encadrée et contrôlée. La proximité de Lampedusa avec les côtes tunisiennes ne doit pas faire de l’Italie le seul pays d’accueil des clandestins. Leur intention déclarée de venir en France ne doit pas davantage suffire à leur garantir un visa. Préoccupé par les conséquences de la révolution, le gouvernement tunisien ne veut pas sévir contre les migrants ou plutôt contre les passeurs qui exigent des sommes élevées, pas plus que, soucieux de sa souveraineté, il n’accepte que nos garde-côtes fassent la police dans ses eaux territoriales.
Absence de concertation.
En conséquence, pour le moment, les migrants, soutenus par les associations humanitaires italiennes qui ont orchestré la tentative de passage en force à Vintimille, ont gagné la première manche. Le préfet des Alpes-Maritimes ne pouvait en effet interdire le passage des trains que pendant quelques heures, pour le cas précis d’une provocation politique de l’extrême gauche italienne. Mais entretemps a éclaté un conflit sérieux entre Paris et Rome. À juste titre, les Italiens proclament qu’ils ne font qu’appliquer le statut de Schengen aux migrants tunisiens. Une fois entrés dans l’espace de Schengen, les étrangers doivent pouvoir y circuler librement. Néanmoins la Commission européenne, soulignant que la mesure française était provisoire, estime qu’elle est légitime. De toute façon, le problème n’est nullement réglé : il y avait plus de manifestants italiens à Vintimille que de Tunisiens. Beaucoup de clandestins sont déjà arrivés en France ; beaucoup piétinent à la frontière entre les deux pays ; aucun ne veut rentrer en Tunisie.
LE CONFLIT ENTRE PARIS ET ROME RÉVÈLE SURTOUT L’INEXISTENCE DE L’EUROPE
La crise révèle l’inanité des institutions européennes, l’apathie de la Commission, l’inexistence de la présidence de l’Union. L’incapacité de l’UE à gérer cette crise (qui se reproduira) relève de la volonté même de Nicolas Sarkozy et d’Angela Merkel qui ne conçoivent l’UE que comme un système dont ils ont le contrôle et qui n’a aucune autonomie politique. Il n’y a pas de budget pour l’immigration, il n’y a pas davantage de marche à suivre, il n’y a pas de concertation. Il n’y a que des pays priés, en quelque sorte, de trouver des solutions nationales à un mal géopolitique qui existe depuis au moins trente ans et pour lequel on n’a appliqué aucun remède européen, alors que l’Union serait infiniment plus forte pour gérer ce dossier, qui, du coup, en serait moins douloureux. Après tout, ce qui arrive à l’Italie est déjà arrivé à la France avec les migrants afghans, kurdes ou irakiens qui veulent se rendre en Angleterre et restent coïncés sur notre territoire. Rien de nouveau sous le soleil, sinon que le tempérament des Italiens, qui parlent de « gifle française » à leur pays, est plus bouillant que celui des Britanniques.
Le 26 avril, un sommet franco-italien réunira à Rome Nicolas Sarkozy et Silvio Berlusconi. Si l’on souhaite que les relations entre les deux pays restent civilisées et exemptes d’injures, il faut préparer la rencontre avec minutie. Les difficultés ne sont pas insurmontables, même en tenant compte d’un afflux exceptionnel et massif de 20 000 Tunisiens. Le fond de l’affaire, l’absence de l’Europe, est infiniment plus grave. C’est une affaire européenne par excellence car il est impossible de livrer l’immigration clandestine aux hasards de la géographie. Tous les pays signataires de l’accord de Schengen sont concernés et c’est ensemble qu’ils doivent rédiger un protocole strict d’admission à l’intérieur de leur espace. Le plus inquiétant, peut-être, c’est le silence des Allemands, qui se sentent de moins en moins concernés par une intégration européenne dont ils sont pourtant les principaux bénéficiaires sur le plan commercial.
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