C’est une découverte pour le moins inhabituelle qu’ont faite Michael Evans-Brown, analyste scientifique à l’observatoire européen des drogues et toxicomanies (EMCDDA) et ses collègues : le tamoxifène, normalement prescrit dans le cancer du sein, est dissimulé dans certains compléments alimentaires consommés par les culturistes pour éliminer le surplus d’œstrogènes après une cure de stéroïdes.
Réparer une bêtise par une autre
Depuis plus de 30 ans, certains adeptes peu scrupuleux du bodybuilding prennent du tamoxifène pour lutter contre les gynécomasties provoquées par la prise de stéroïdes anabolisants. Habituellement, ils se fournissent via le marché noir. Mais des rumeurs persistantes sur les forums dédiés à la musculation ont prétendu que les suppléments alimentaires Esto Suppress, qui comme leur nom l’indique, sont destinés à supprimer l’effet des œstrogènes, vendus au Royaume-Uni et aux États-Unis par Pharma Labs (mais non disponible en France), contennaient du tamoxifène.
La raison de cette suspicion ? La présence sur l’étiquette d’un des noms chimiques du tamoxifène : le (Z)-1-(p-dimethylaminœthoxyphenyl)-1,2-diphényl-1butène.
Michael Evans-Brown et ses collègues ont donc analysé par spectrographie de masse 4 échantillons achetés entre fin 2011 et début 2012. Ils ont découvert que le tamoxifène était bien présent dans 3 des 4 gélules à des doses de 3,8 mg, 0,9 mg et 3 mg. Ces quantités ne sont pas négligeables si on prend en compte le fait qu’il est recommandé par le fabricant de consommer 2 gélules par jour, et que l’on prescrit 10 à 20 mg de tamoxifène dans le traitement de la gynécomastie. « Nous ne savons pas si les gélules d’Esto Suppress vendues actuellement contiennent du tamoxifène, » avouent cependant les auteurs.
Un étiquetage insuffisant
« La plupart des utilisateurs ne sont pas au courant du contenu réel de ce type de compléments alimentaires » estime Michael Evans Brown. « Les médecins doivent s’inquiéter des compléments alimentaires consommés par leurs patients et signaler tout effet indésirable. »
Dans des publications précédentes il avait déjà pointé du doigt que, depuis le début des années 2000, on assistait à une explosion du nombre de compléments alimentaires disponibles à la vente comportant des stéroïdes ou des anxiolytiques retirés du marché pharmaceutique ou qui n’ont même jamais été testés chez l’homme. « Ces composants ne sont souvent pas signalés ou marqués comme étant ’naturels’ répandant l’idée qu’il s’agit de produits sains et sans danger. »
Is the breast cancer drug tamoxifen being sold as a bodybuilding dietary supplement ? BMJ 2014 ;348:1476
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