VINGT CINQ ANS après Tchernobyl, l’explosion de Fukushima relance le débat sur le risque de cancer de la thyroïde en cas d’exposition aux radiations. Il est, certes, encore trop tôt pour évaluer l’impact de l’accident de la centrale japonaise sur les populations. Mais une chose est sûre : les mesures d’évacuation et de distribution d’iode ont été prises très rapidement. Deux mesures indispensables pour prévenir le cancer de la thyroïde.
De fait, en cas de contamination nucléaire, le risque dépend de l’activité du corps thyroïde et, donc, de son besoin en iode. « La glande thyroïde est comme une éponge, souligne le Dr Stéphane Bardet, chef du service de médecine nucléaire du centre François-Baclesse de Caen. Si elle est saturée par de l’iode stable, l’iode radioactif (potentiellement cancérigène) ne parvient pas à être absorbé. D’où l’intérêt de donner de l’iode aux populations concernées, dès les premières heures après une explosion nucléaire », rappelle-t-il. Une décision qui relève des autorités sanitaires.
A priori, une seule dose d’iode est nécessaire (comprimé de 65 mg quadrisécable). Celle-ci devant être donnée à l’ensemble de la population et surtout aux enfants. Car leur thyroïde, encore en croissance cellulaire, est avide d’iode. « Autour de Tchernobyl, par exemple, les cancers ont été surtout observés chez les enfants, avec deux facteurs aggravants : le jeune âge et une carence préalable en iode », confirme le Dr Bardet.
En France, Tchernobyl n’a pas, selon les spécialistes, entraîné d’augmentation significative du risque de cancer de la thyroïde. Mais des mesures de prévention en cas d’explosion nucléaire ont été mises en œuvre. Des distributions d’iodure de potassium ont, notamment, été organisées par les autorités sanitaires pour les populations réparties dans un rayon de 10 km autour des sites nucléaires. Les personnes habitant près de Cherbourg (à proximité de la centrale de Flamanville) ont, par exemple, reçu des pastilles d’iodure de potassium qu’ils stockent et devront utiliser, en cas d’accident, selon les consignes.
95 %de guérison définitive.
Relativement rare en France, le cancer de la thyroïde a augmenté de 6 % par an entre 1980 et 2005. Les moyens diagnostiques beaucoup plus précis et efficaces – tels que l’échographie, qui détecte les microcarcinomes – expliquent en grande partie cette augmentation. En parallèle, la mortalité a nettement diminué (5 % de décès, 95 % de guérison définitive). « Les décès concernent surtout des cas déjà évolués au moment du diagnostic, en métastase d’emblée. Ou des formes histologiques particulièrement agressives, comme les formes anaplasiques qui sont, toutefois, en forte régression », précise le Pr Danièle Dehesdin, cancérologue et présidente de la SFORL.
Pour être optimale, la prise en charge doit être pluridisciplinaire : chirurgien ORL, endocrinologue, médecin nucléaire et radiologue doivent entourer le patient. « Notre diagnostic est, ainsi, de plus en plus précoce et précis. Il s’appuie sur des enquêtes cliniques, biologiques et d’imagerie menant – si besoin et si possible – vers une ponction cytologique », confie le Pr Bernard Guerrier, chef de service ORL du CHU de Montpellier.
Par ailleurs, les techniques permettant de soigner le cancer de la thyroïde sont désormais bien établies. « Le traitement s’appuie en priorité sur l’ablation de la thyroïde, qui est une chirurgie fréquente en France et effectuée, dans la majorité des cas, par des chirurgiens ORL », indique le Pr Emmanuel Babin, ORL au CHU de Caen. Quand un cancer de la thyroïde est avéré, le geste chirurgical est complété par le curage des ganglions régionaux qui sont au contact d’éléments anatomiques importants, comme le nerf récurrent, dont le traumatisme peut engendrer des troubles vocaux. Après une thyroïdectomie, des fourmillements et des crampes peuvent également survenir à cause d’une baisse de calcium dans le sang (hypoparathyroïdie). La vascularisation des glandes parathyroïdes est, en effet, très intime avec la thyroïde. Il faut respecter ces parathyroïdes pour prévenir un dysfonctionnement après la chirurgie. « Le risque d’hypoparathyroïdie définitive est proche de 6 %. Les équipes chirurgicales doivent donc être bien entraînées pour effectuer un traitement curatif avec le moins de séquelles possibles », conclut le Pr Babin.
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