Après deux avis défavorables à l’utilisation des autotests de l’infection à VIH, en 1998 et en 2004, le Conseil national du sida (CNS) s’est prononcé dans un avis rendu public aujourd’hui à leur mise à disposition en pharmacie, en parapharmacie mais aussi sur Internet.
Le CNS répondait à une saisine de la ministre de la Santé qui dans un courrier du 8 août 2012 fait explicitement référence à l’autotest salivaire de dépistage de l’infection à VIH autorisé en juillet 2012 aux États-Unis. « Le 3 juillet dernier, l’agence américaine des médicaments (FDA) a autorisé la mise sur le marché d’un TROD VIH (Oraquick) en tant qu’autotest sans supervision médicale. Ce test sera en vente libre à partir d’octobre 2012 dans plus de 30 000 points de distribution aux États-Unis et il est très probable qu’on ne le retrouve après cette date, accessible sur Internet », écrit-elle.
S’ils ne sont pas autorisés en Europe, les autotests les tests de dépistage avec auto-prélèvement capillaire à domicile sont disponibles légalement aux États-Unis depuis 1996.
Un rapport bénéfices/risques favorable
La nouveauté est que le nouveau test Oraquick in Home HIV approuvé aux États-Unis a fait l’objet d’une évaluation approfondie qui a montré une amélioration des performances de l’autotest. Celui-ci présente une spécificité (capacité à donner un résultat négatif lorsque l’infection n’est pas présente) de 98 %, jugée satisfaisante, et une sensibilité (capacité à donner un résultat positif lorsque l’infection est présente) de 92,9 %. Cette sensibilité est « relativement moins satisfaisante » notamment en phase de primo-infection, relève le CNS qui souligne même qu’une étude réalisée par une équipe française a révélé une sensibilité encore moindre de 86,5 %. Toutefois, le rapport bénéfices/risques quelles que soient les hypothèses retenues, notamment concernant le niveau de sensibilité et l’apparition de faux négatifs, reste favorable.
Son introduction en France permettrait la première année de découvrir 4 000 nouvelles infections et d’en éviter 400.
L’épidémie cachée
Ces chiffres sont à mettre en regard avec les 30 000 personnes infectées par le VIH et qui en France l’ignorent (soit 20 % des 150 000 personnes infectées). On estime que le taux de transmission du VIH dans la population des personnes qui ne se savent pas séropositives est 3 à 7 fois plus élevé que dans celle des personnes infectées. Cette « épidémie cachée » et le retard de diagnostic qui en découle, ont une incidence pour les personnes infectées (pertes de chances) et pour la collectivité. « Il est aujourd’hui prouvé que le traitement antirétroviral, en diminuant la quantité de virus présente dans les sécrétions génitales, réduit très fortement le risque que la personne infectée transmette le virus par voie sexuelle », rappelle le CNS.
Une introduction de ces autotests permettrait de mieux adapter le dispositif d’offre de dépistage au contexte épidémiologique, médical et social actuel de la lutte contre le VIH en France. Il constituerait un outil additionnel, complémentaire peut permettre de toucher les personnes qui n’auraient pas eu recours au dépistage. Chez les homosexuels, ceux qui vivent une sexualité secrète, qui habitent dans des petites villes ou des zones périurbaines ou rurales et recherchent plus d’anonymat ou encore les personnes réticentes à se rendre dans un CDAG (Centre de dépistage anonyme et gratuit) ou en grande précarité (migrants, prostituées, usagers de drogues par voie injectable) pourraient bénéficier du dispositif.
Disponibles aussi sur Internet
Pour cela les modes d’accès aux tests doivent être « diversifiés et adaptés » à leurs besoins. Le CNS propose de les rendre disponibles en vente libre dans les pharmacies, les parapharmacies, sur Internet mais aussi dans le cadre d’une distribution gratuite assurée par les associations, centres d’information, de dépistages et en médecin générale. Différents documents devront être fournis afin de préciser les conditions pratiques d’usage (prélèvement et analyse des résultats), les limites du test, en particulier celles liées à la fenêtre de séroconversion, et les enjeux du test de confirmation. Les coordonnées de structures compétentes devront être précisées de même que l’offre d’assistance à distance disponible 24 h/24 et 7 j/7 assurée par un opérateur tel que Sida Info Service par exemple.
Les associations comme Aides ou Warning se sont d’ores et déjà déclarées favorable à l’autorisation de ces autotests. Aides met l’accent sur l’accompagnement et l’accès « à une information objective et de qualité pour s’assurer de la compréhension des enjeux, des limites et des techniques par l’utilisateur ». Selon l’association, le dispositif d’accompagnement (physique, téléphonique, par Internet) « doit être financé par les producteurs de tests et doit s’appuyer sur l’expérience des acteurs associatifs formés à l’usage des TROD et des acteurs médicaux déjà présents dans le champ du dépistage du VIH ».
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