Il n’y a pas de changement dans le sens où il n’y a pas de vaccin nouveau. Les 11 vaccins obligatoires pour les enfants nés à partir du 1er janvier 2018 étaient déjà obligatoires (DT Polio) ou fortement recommandés.
La concertation citoyenne (jury professionnel et jury citoyen) avait le choix entre la suppression totale des obligations et leur extension à tout le calendrier vaccinal. Elle a recommandé fin 2016 l’extension temporaire des obligations vaccinales. Était-ce pertinent sur le plan stratégique ? « Il n’y avait pas d’autre solution. La couverture vaccinale s’érodait. Les enquêtes montraient que si les obligations vaccinales étaient totalement supprimées, 15 % des 25-35 ans ne feraient plus vacciner leurs nourrissons, y compris contre DT Polio ! La suppression totale des vaccinations aurait eu en France de graves conséquences pour la santé publique », note le Dr Vie le Sage. Certes, le caractère obligatoire choque environ 5 % des parents, mais « ces derniers étaient déjà dans une opposition de principe. Pour eux, la position anti-vaccinale est du domaine de la foi », précise-t-il.
L’obligation, support pour convaincre
« Le véritable changement, c’est le message fort des autorités de santé pour soutenir les recommandations et notre pratique vaccinale. À partir de 2018, pour la 1re fois en France, une génération entière sera protégée dès le plus jeune âge contre onze maladies, grâce à 4 vaccins (hexavalent, pneumocoque, méningo C et rougeole rubéole) en 10 injections », souligne le Dr Vié le Sage. Les vaccinations ne pourront être reportées au-delà des 3 premiers mois de l’entrée en collectivité (crèche ou école). L’idée n’est pas de sanctionner, d’interdire l’entrée à la crèche, mais de convaincre les parents que les vaccins sont utiles à leurs enfants.
Cette cohésion entre le corps médical et les autorités était très attendue en France, pays où le pourcentage de parents hésitants pulvérise des records (41 % contre 13 % ailleurs dans le monde). Les parents sont déstabilisés par ce qu’ils entendent et ce qu’ils lisent (médias, réseaux sociaux). Les études montrent que le médecin choisi par les parents est le plus à même de convaincre les hésitants. Encore faut-il qu’il soit conforté dans son action par les recommandations des autorités de santé, et convaincu sur des données scientifiques. Des ressources sont disponibles sur divers sites professionnels (1). À lui d’écouter avec empathie, de valoriser la vigilance des parents… et de faire comprendre que les professionnels vaccinent dans l’intérêt de l’enfant.
Dans le « Manifeste pour les onze vaccins obligatoires de l’enfant », 49 Sociétés savantes ont soutenu l’extension des obligations vaccinales décidée par la ministre de la Santé Agnès Buzin. Le Collège des enseignants de médecine générale et la Société de santé publique ne l’ont pas signé par crainte du caractère possiblement contre-productif de l’obligation. « Cet argument ne se concrétise pas dans la réalité », précise le Dr Vie le Sage. Un sondage « Survey Monkey » qu’il coordonne montre, avec plus de 660 réponses de pédiatres libéraux, qu’ils ont moins de difficulté à convaincre les parents depuis l’extension de la politique vaccinale. Or ces spécialistes sont particulièrement interpellés dans leurs cabinets par les hésitations.
Le manifeste des 49 sociétés savantes conclut sur la nécessité aussi de cibler la vaccination de l’adolescent, particulièrement à risque d’hépatite B, d’infections à papillomavirus et de méningite à méningocoque (2e pic après le nourrisson), et très mal vaccinée. La couverture vaccinale peine à atteindre 30-40 % pour l’hépatite B, 20 % à 2 doses pour le papillomavirus…
(1) afpa.fr, infovac.fr, mesvaccins.net, sfmg.org, sfpediatrie.com, vaccination-info-service.fr…
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