CONGRES HEBDO
A PRES avoir démontré, dans les années quatre-vingt, l'intérêt d'instaurer dans les cancers bronchiques non à petites cellules (CBNPC) - réputés chimiorésistants -, une chimiothérapie à base de cisplatine (la médiane de survie est alors augmentée de 2,5 mois et la survie à un an de 10 %) dans les formes très avancées, on a ensuite prouvé son intérêt dans les formes un peu moins avancées . dans les formes inopérables mais non métastatiques, il apparaît préférable d'associer la chimiothérapie à la radiothérapie. Enfin, plus récemment, un grand essai français coordonné par le Pr Alain Depierre (CHU de Besançon) ayant fait l'objet d'une communication orale à l'ASCO* en 1999, a permis de montrer que, dans les stades précoces, la chimiothérapie préopératoire augmentait la survie.
Un choix thérapeutique élargi
La nature de la chimiothérapie a également évolué puisqu'on dispose maintenant de nouveaux produits comme le paclitaxel (Taxol), le docetaxel (Taxotère), la gemcitabine (Gemzar) qui sont des alternatives à l'association navelbine-cisplatine préconisée pendant de nombreuses années dans la plupart des protocoles français de traitement des CBNPC. Néanmoins, le bénéfice médical de ces drogues, plus récentes mais relativement coûteuses, devait être précisément évalué.
C'est ce qu'ont fait deux grands essais américains publiés en 1999 et en 2000. L'essai du SWOG a comparé chez des patients atteints de CBNPC de stades IIIb et IV les associations cisplatine + navelbine et carboplatine + taxol : les deux protocoles ont donné les mêmes taux de réponse (27 %), les mêmes médianes de survie (8 mois), la même survie à un an (33 %), mais un profil de tolérance un peu différent : la toxicité hématologique et digestive a été plus importante dans le bras cisplatine-navelbine et la toxicité neurologique plus marquée dans le bras carboplatine-taxol.
Le groupe d'étude européen ECOG a publié récemment les résultats d'un très grand essai mené chez 1 200 patients atteints de CBNPC également de stade IIIb et IV comparant quatre groupes de 300 patients chacun : un bras de référence (cisplatine-taxol), auquel étaient comparées les associations suivantes : cisplatine-gemzar, cisplatine-taxotère et carboplatine-taxol. Les taux de réponse varient entre 15 et 20 %, ce qui est relativement bas, et la médiane de survie est comprise entre 7,4 et 8,2 mois. Seuls les profils de toxicité présentaient de réelles différences, le bras carboplatine-taxol ayant généré le moins d'effets secondaires de grades 3 et 4. La survie sans progression, c'est-à-dire la survie jusqu'à ce que la tumeur réévolue, a été significativement supérieure dans le bras cisplatine-gemcitabine.
Ces différentes études ont montré que l'on obtenait, dans ces formes métastatiques ou localement avancées, mais non irradiables, globalement 8 mois de médiane de survie, de 30 à 35 % de survie à un an, quel que soit le type de chimiothérapie. Le choix du protocole se fera surtout sur les profils de toxicité des différentes drogues et sur des critères pharmaco-économiques.
Dans les formes opérables de CBNPC, l'essai Depierre qui a rassemblé en France 355 patients, a permis de montrer qu'une chimiothérapie préopératoire améliorait la survie de manière significative dans les stades Ib et II, mais pas dans les stades IIIa.
Enfin, une chimiothérapie de 2e ligne est préconisée depuis peu chez les patients atteints de CBNPC métastatiques qui échappent à une première chimiothérapie, notamment avec le taxotère qui a l'AMM dans cette indication et l'avantage d'être bien supporté sans altérer la qualité de vie des patients : cela permet de retrouver secondairement une médiane de survie (de 6-8 mois) qui se rapproche de la médiane initiale.
Les progrès de la radiothérapie
Toujours dans le domaine du CBNPC, il faut rappeler les progrès des techniques de la radiothérapie : le développement de la radiothérapie conformationnelle, avec dosimétrie en 3D, sera disponible dans des centres de plus en plus nombreux ; elle permet de délivrer une dose plus forte au niveau de la tumeur tout en respectant davantage les tissus sains de voisinage.
Le rôle d'une irradiation prophylactique de l'encéphale dans les formes localement avancées a été récemment suggéré chez les patients qui ont de bons résultats sous chimio- et radiothérapie, afin d'éviter les rechutes purement cérébrales. Jusqu'à présent, l'intérêt de ce type d'irradiation n'avait été démontré en termes de survie que chez les patients atteints de cancer à petites cellules, et uniquement chez ceux en rémission complète.
Dans les cancers bronchiques à petites cellules (CBPC), il n'y a pas de révolution thérapeutique, si ce n'est l'arrivée d'un nouveau médicament qui représente une alternative pour les traitements de première ligne : il s'agit du topotécan (Hycamtin) qui, associé au cisplatine, donne des résultats au moins identiques à l'association cisplatine-VP16 ; il présentera peut-être un intérêt ultérieur, soit en 1re ligne si l'équivalence, voire la supériorité, de l'association cisplatine-topotécan par rapport aux autres traitements classiques se confirme, soit en 2e ligne.
Un autre essai auquel ont participé de nombreux centres français, coordonné par Jean-Louis Pujol (CHU Montpellier), a comparé l'association cisplatine-VP16 à cisplatine-VP16 + épirubicine + endoxan (deux drogues versus quatre) dans les formes disséminées de CBPC. Cet essai, actuellement présenté à l'ASCO* cette année et en cours de publication, a montré que l'adjonction d'épirubicine et d'endoxan au protocole classique entraînait une augmentation modeste mais significative de la survie, au prix d'une augmentation de la toxicité, notamment hématologique.
Enfin, dans les formes localisées de CBPC, un autre essai français actuellement en cours, coordonné par l'-nstitut Gustave-Roussy, compare deux doses de chimiothérapie lors de la 1re cure, afin de déterminer la dose d'attaque qui a les meilleurs résultats ; les cinq cures suivantes sont programmées aux mêmes doses dans les deux bras, et la radiothérapie est pratiquée en alternance avec la chimiothérapie.
Parmi les espoirs thérapeutiques de demain, il faut citer les modificateurs biologiques qui sont inclus dans des protocoles d'essais thérapeutiques en association aux traitements classiques, aussi bien dans le CBNPC que dans le CBPC : il s'agit d'inhibiteurs de l'angiogenèse ou d'inhibiteurs des récepteurs de certains facteurs de croissance comme l'Herceptine qui a montré son intérêt dans le cancer du sein et pourrait peut-être être intéressante dans les CBPC.
D'après un entretien avec le Pr Elisabeth Quoix, CHU de Strasbourg
* ASCO : American Society of Oncology.
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