I L est difficile de trouver des facteurs prédisposants au cancer de la prostate du fait de l'âge tardif au moment du diagnostic et de l'intrication de facteurs environnementaux et génétiques. Après avoir réussi à identifier et à cloner les gènes BRCA1 et BRCA2 de susceptibilité du cancer du sein, on pensait que le même type de facteur de prédisposition génétique allait pouvoir être trouvé dans le cancer de la prostate. Depuis le début des années 1990, en effet, les gènes des sujets porteurs de formes familiales de cancer de la prostate sont passés au crible et quatre loci de susceptibilité ont déjà été décrits (1q24-25,1p36n,1q42.2, 20q13, Xq27-28). Aucun de ces gènes n'a réellement fait la preuve de son implication dans le cancer de la prostate pour plusieurs raisons : l'absence de clonage des gènes, la non reproductibilité des résultats lors d'études portant sur des familles différentes et l'absence de données longitudinales significatives au sein des membres d'une même famille.
Plusieurs gène semblent en cause
Le polymorphisme des gènes codant pour les récepteurs aux androgènes et pour la 5-alpha réductase a aussi fait l'objet d'études mais, une fois de plus, aucun allèle dominant n'a été retenu dans les familles à haut risque. Il semble certain aujourd'hui que plusieurs gènes de susceptibilité sont en cause dans les formes familiales de cancer de la prostate.
L'étude publiée cette semaine par une équipe de Salt Lake City a mis en évidence un gène présent sur le chromosome 17p (ELAC2) des membres de 33 familles à risque.
Utah : une population d'étude exceptionnelle
La population de l'Utah offre un échantillon exceptionnel pour rechercher l'origine génétique d'une maladie, car elle est la descendance de migrants anglais, scandinaves et allemands dont les caractéristiques génétiques sont typiquement celles des Européens du Nord. Pour affiner la localisation du gène, les chercheurs ont étudié 94 familles supplémentaires, mais le lien avec le chromosome 17p a alors perdu sa significativité. L'hétérogénéité des familles et la complexité de la maladie sont, d'après les rapporteurs de l'étude, en cause dans cet échec relatif. Des analyses ultérieures, ciblées sur les 33 familles porteuses du gène ELAC2, ont toutefois permis de localiser un haplotype commun sur le chromosome 17p. Dans ce locus, un gène code pour une protéine (dont la famille n'est pas encore déterminée) qui est conservée chez les procaryotes et les eucaryotes. Il est possible que ce gène code pour une enzyme (hydrolase) qui joue un rôle dans les systèmes de réparation, car il présente des similitudes avec une famille de protéines connue pour ce type de propriétés.
Plusieurs mutations du gène ELAC2
Le fait d'avoir trouvé plusieurs mutations du gène ELAC2 chez des sujets atteints de cancer de la prostate est aussi en faveur du rôle de ce gène.
« Une chose est certaine, comme le fait remarquer dans un éditorial le Dr Petters de Seattle, la susceptibilité au cancer de la prostate est déterminée par une combinaison d'effets de gènes et certainement pas par un événement isolé. Pour valider l'hypothèse du rôle du gène ELAC2, il faut maintenant rechercher la fréquence de ses différents allèles au sein d'une population générale, dans une étude cas témoins qui fera participer des groupes ethniques différents. Par ailleurs, l'interaction des allèles ELAC2 avec les autres gènes de susceptibilité doit être évaluée. »
Sean Tavtigian et coll., « Nature Genetics », vol 27, février 2001, et éditorial de M. Peters et E. Ostrander (Seattle).
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