Un déficit hippocampique dans la maladie d’Alzheimer

Compenser la perte en protéine EphB2, une nouvelle piste de traitement

Publié le 29/11/2010
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Crédit photo : BSIP

De notre correspondante

DANS LA MALADIE d’Alzheimer, les oligomères d’amyloïde bêta solubles pourraient contribuer aux déficits cognitifs (apprentissage et mémoire) en inhibant la potentialisation a long terme dépendante des récepteurs NMDA, qui sous-tend la formation de la mémoire.

Or, une récente étude a montré que les patients atteints de la maladie d’Alzheimer, ainsi que le modèle murin de la maladie (souris transgénique APPh), présentent dans l’hippocampe, centre cérébral de la mémoire, une déplétion du récepteur tyrosine kinase EphB2, qui régule le signal des récepteurs NMDA.

Une équipe dirigée par le Dr Lennart Mucke (Gladstone Institute of Neurological Disease, San Francisco) a donc émis l’hypothèse que cette perte de la protéine EphB2 pourrait être causée par les oligomères d’amyloïde bêta.

Les oligomères d’amyloïde bêta se lient à l’EphB2.

Ils montrent en utilisant des cultures de neurones que, effectivement, les oligomères d’amyloïde bêta se lient à l’EphB2 et déclenchent la dégradation d’EphB2 dans le protéasome cellulaire.

Afin de déterminer les conséquences pathogéniques de la perte d’EphB2 dans la maladie d’Alzheimer et le modèle murin apparenté, les chercheurs ont utilisé un vecteur lentiviral pour augmenter ou diminuer l’expression neuronale d’EphB2 dans le centre cérébral de la mémoire (gyrus dentelé, une région de l’hippocampe) des souris.

L’inactivation d’EphB2 (par transfert d’un ARNsh) réduit effectivement les courants du récepteur NMDA et altère la potentialisation a long terme (LTP) dans le gyrus dentelé, lesquels sont importants pour la formation de la mémoire. Inversement, l’augmentation de l’expression d’EphB2 dans le gyrus dentelé des souris transgéniques APPh est capable de faire régresser ces déficits de mémoire.

« Par conséquent, la déplétion d’EphB2 est cruciale dans le dysfonctionnement neuronal induit par l’amyloïde bêta. Il pourrait être bénéfique d’augmenter les taux ou la fonction d’EphB2 dans la maladie d’Alzheimer », concluent les chercheurs.

« Il reste à savoir si les pertes d’EphB2 contribuent à des altérations induites par l’amyloïde bêta dans d’autres régions cérébrales, et si l’augmentation dans les neurones des taux d’EphB2 dans ces régions est aussi bien tolérée que dans le gyrus dentelé, laissent-ils entrevoir. Si oui, alors des traitements pharmacologiques peuvent être utilisés pour augmenter l’expression ou l’activité d’EphB2. »

Les interventions pourraient également porter sur d’autres points d’entrée : bloquer, par des petites molécules, la fixation des oligomères d’amyloïde bêta aux domaines FN de l’EphB ; empêcher la dégradation protéasomique de l’EphB2 ; améliorer ses interactions avec les récepteurs NMDA.

Nature, 28 novembre 2010, Cissé et coll., DOI : 10.1038/nature09635.

Dr VÉRONIQUE NGUYEN

Source : Le Quotidien du Médecin: 8865