Chez les personnes âgées, la dénutrition est un cercle vicieux : l’insuffisance d’apports se traduit par une perte de poids, conduisant à un état de fragilité, puis à des épisodes pathologiques de plus en plus longs, fréquents et graves. Une fois le processus enclenché, il devient difficile de revenir à un bon état nutritionnel. D'où l'intérêt de dépister la perte de poids le plus tôt possible. Cancers, insuffisances d’organe sévères (cardiaque, respiratoire, rénale et hépatique), pathologies digestives, inflammatoires ou infectieuses chroniques... peuvent entraîner une dénutrition à tout âge.
Certains facteurs de risque sont plus spécifiques aux personnes âgées : facteurs psycho-socio-environnementaux (solitude, veuvage, entrée en institution…), dépendance, dépression, démence, troubles buccodentaires, troubles de la déglutition, polymédication et régimes. Enfin, toute pathologie aiguë ou décompensation d’une pathologie chronique est susceptible d’entraîner ou d’aggraver une dénutrition.
Modifications récentes
S'il n’existe pas de manière validée d’évaluer l’appétit chez les personnes âgées, cela peut se faire de manière aisée par le médecin et le diététicien avec des questions simples : « Avez-vous bon appétit ? » ou « Constatez-vous une perte d’appétit ? ». Il est aussi possible d’utiliser une échelle visuelle analogique (EVA) pour côter l’appétit.
L’objectif : mettre en évidence des modifications récentes de l’appétit et des apports alimentaires, signaux d’alarme de dénutrition. Les marqueurs nutritionnels simples − poids, calcul de la perte de poids, indice de masse corporelle (IMC) et albuminémie − suffisent le plus souvent pour le dépistage et le diagnostic de dénutrition. Le dépistage peut aussi être réalisé grâce au questionnaire mini nutritional assessement (MNA). Quant au diagnostic, il repose sur la présence d'un ou plusieurs des critères suivants : perte de poids supérieure à 5 % en 1 mois ou 10 % en 6 mois, IMC ≤ 21, albuminémie < 35 g/l et MNA < 17.
Un protocole bien défini
La prévention de la dénutrition doit s’adresser à l’ensemble de la population âgée, avec des mesures de conseils nutritionnels et de maintien d’une activité physique modérée, accompagnée d’une surveillance du poids. L’identification des sujets âgés plus spécialement à risque de dénutrition implique, une évaluation clinique globale, orientée vers la recherche de facteurs susceptibles d’être corrigés et du maintien ou de l'augmentation des apports nutritionnels.
Souvent suffisante, la prise en charge nutritionnelle orale qui doit être privilégiée, avec un diététicien − conseils, aide à la prise alimentaire, alimentation enrichie et des compléments nutritionnels oraux (CNO). Si l’alimentation orale est impossible ou insuffisante, l’alimentation entérale ou parentérale doit être envisagée.
Chez toute personne âgée vivant à domicile, le poids doit être mesuré au moins une fois par an. Chez celles qui sont à risque de dénutrition, la surveillance doit être plus rapprochée (le rythme est fonction de l’importance du risque et des apports alimentaires) pour corriger rapidement une éventuelle perte de poids.
Des acteurs dédiés
À domicile, différentes aides peuvent être proposées pour améliorer la prise en charge nutritionnelle : aide-ménager.e et/ou auxiliaire de vie sociale, portage des repas. En établissement, la direction et les soignant.e.s, encadré.e.s par le médecin coordinateur ou le médecin traitant, doivent porter une attention toute particulière à la prévention et au dépistage de la dénutrition. Enfin, à l’hôpital, le comité de liaison alimentation et nutrition (CLAN) et les unités transversales de nutrition clinique (UTNC) participent à l’amélioration de la prise en charge nutritionnelle des malades.
Claire Patry et Agathe Raynaud-Simon. La dénutrition : quelles stratégies de prévention ? Gérontologie et société 2010/3(33);134
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