Protection obstétricale du périnée

Des méthodes de prévention

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Publié le 02/06/2016
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périnée

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Crédit photo : PHANIE

L’accouchement par voie basse peut être à l’origine de complications périnéales, notamment des déchirures musculaires. Elles peuvent être simples, lorsqu’elles respectent le sphincter anal, ou complètes lorsqu’il est aussi concerné (périnées complets et périnées complets compliqués lorsqu’en plus la muqueuse anale est touchée). « Ces déchirures sont à l’origine de trois sortes de problèmes : un risque de saignement important, un risque de douleur immédiate, mais aussi chronique à long terme, et un risque de difficulté de réparation qui nécessite une formation spécifique pour les praticiens » souligne le Pr Renaud de Tayrac (CHU de Nîmes).

Les séquelles fonctionnelles postnatales sont également fréquentes : 30 % d’incontinence urinaire à court terme, 10 % entre 3 et 12 mois après l’accouchement et 10 % d’incontinence anale à court terme, 4 % après 3 mois. L’incontinence urinaire d’effort est due à une distension importante des ligaments et du plancher pelvien et l’incontinence anale est liée à une déchirure du sphincter anal.

Des lésions de dénervation sont souvent associées, pouvant entraîner des troubles de la vidange vésicale ou une hyperactivité vésicale ainsi que des troubles sexuels. Enfin, il existe un risque de prolapsus génital (< 1 % après l’accouchement) mais dont le risque augmente avec le temps.

Les principaux facteurs de risque reconnus sont la macrosomie fœtale, la position occipito-sacrée, le travail prolongé notamment à la phase d’expulsion et l’extraction par forceps.

Épisiotomie et césarienne : si indiquées !

« En ce qui concerne l’épisiotomie, qui a été largement pratiquée dans les années 1980, le CNGOF a émis, en 2006, des recommandations de pratique clinique, précisant qu’il n’y avait pas lieu de la pratiquer préventivement, si ce n’est dans certaines indications laissées à l’appréciation de l’accoucheur. Une épisiotomie médiolatérale doit être pratiquée de préférence. Dans d’autres pays européens, en cas de forceps ou de ventouse, l’épisiotomie est recommandée car elle aurait un effet préventif sur les complications périnéales », explique le Pr de Tayrac.

Par ailleurs, la réalisation d’une césarienne ne permet pas une protection périnéale parfaite : la grossesse a en elle-même un effet délétère sur la fonction anale et le prolapsus. Il n’y a donc pas d’indication à la réalisation d’une césarienne pour prévenir une complication périnéale, sauf chez une patiente à risque particulier : patiente ayant déjà eu une complication périnéale et ayant été opérée (déchirure du sphincter anal), par exemple.

Pas d’appui ventral, ralentissement de la progression…

Certaines méthodes ont été reconnues comme utiles en prévention. « Ne pas pousser sur le ventre de la parturiente au moment de l’expulsion permet de diminuer les complications. Ne pas faire d’épisiotomie médiane et ralentir la progression de la tête pour que le bébé ne sorte pas trop vite » ajoute le Pr de Tayrac.

D’autres méthodes sont discutées : faire une épisiotomie médiolatérale, faire une épisiotomie en cas d’accouchement difficile, mettre la paume de la main pour retenir le périnée, raccourcir la durée d’expulsion…

Les mesures d’hygiène de vie pendant la grossesse sont importantes : traiter la constipation, limiter la prise de poids, etc.

Enfin, l’intérêt de la rééducation périnéale a été récemment revu. Dans les recommandations de décembre 2015, le CNGOF souligne qu’elle ne doit pas être prescrite systématiquement. Elle n’est indiquée qu’en cas d’incontinence urinaire ou anale persistante trois mois après l’accouchement. « De même, certaines études (anglaise et norvégienne) ont montré un bénéfice sur le post-partum de la rééducation périnéale pendant la grossesse mais d’autres ont eu des résultats négatifs… Ainsi, aujourd’hui, en population générale, la rééducation avant l’accouchement n’est pas recommandée », déclare le Pr de Tayrac. Elle peut toutefois être prescrite en cas d’incontinence urinaire pendant la grossesse.

D’après un entretien avec le Pr Renaud de Tayrac (CHU de Nîmes)

Christine Fallet

Source : Bilan Spécialiste