Cancer du poumon

Des traitements efficaces quelles que soient les spécificités tumorales

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Publié le 12/07/2017
immunothérapie cancer du poumon

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Crédit photo : SPL/PHANIE

Si l’immunothérapie confirme sa place prépondérante acquise lors de ces deux dernières années dans le traitement du cancer bronchique non à petites cellules (CBNPC) métastatique, les thérapies ciblées de seconde génération ont également marqué le congrès de l’ASCO par le bénéfice apporté par rapport aux molécules de première génération. Néanmoins, la prise en charge des nombreux patients âgés présentant un cancer pulmonaire reste encore à améliorer.

L’immunothérapie confirme son efficacité en 1re ligne métastatique

« On a des données qui confirment l’efficacité de l’immunothérapie », affirme le Pr Christos Chouaid, pneumologue au CHI de Créteil. En effet lors de cette 63e édition du congrès de l’ASCO, le pembrolizumab a confirmé son efficacité en 1re ligne métastatique des CBNPC avec l’actualisation de l’étude de phase III KEYNOTE 024 (1). Après 19 mois de suivi des 305 patients inclus, la réduction du risque de mortalité était de 37 % sous pembrolizumab, comparé à la chimiothérapie (61 % versus 43 % ; p = 0,003). La médiane de survie globale (SG) n’était pas atteinte dans le bras pembrolizumab versus 14,5 mois avec la chimiothérapie. Quant au risque de progression, il était réduit de 46 % : taux de survie sans progression (SSP) de 51 % sous pembrolizumab versus 24,6 % sous chimiothérapie (médiane de SSP : 18,3 versus 8,4 mois). Dans l’étude de phase I/II Keynote 021 (2) incluant 123 patients atteints de CBNPC métastatique non épidermoïde (EGFR et ALK négatif), le pembrolizumab en association au pemetrexed et au carboplatine, améliore également la SSP en 1re ligne métastatique, par rapport à la combinaison pemetexed-carboplatine : 56,4 % versus 33,9 % à 12 mois. Ainsi, la médiane de SSP était non atteinte dans le groupe avec pembrolizumab versus 8,9 mois dans le bras comparateur (p = 0,0038). Les résultats montrent également, une augmentation du taux de réponse : 56,7 % versus 30,2 % (p = 0,0016).

« Comme dans le mélanome, on assiste depuis 3 ans à une vraie révolution dans le cancer du poumon. Le pembrolizumab en 1re ligne concerne 15 à 20 % des patients qui expriment de façon importante PDL-1 au niveau des cellules tumorales. Sauf effets secondaires graves, ces patients répondeurs ont une vie normale », remarque le Pr Christos Chouaid. « Les effets secondaires sont rares mais peuvent être graves, multi-organes et surprenants. Cela oblige à organiser autour des centres de cancérologie un réseau d’experts locaux formés, capables de les prendre en charge. Il existe une courbe d’apprentissage qui permet de réagir vite et dans la grande majorité des cas d’avoir des effets secondaires rapidement réversibles. L’éducation thérapeutique des patients est aussi fondamentale dans ce contexte ».

Une nouvelle génération de thérapies ciblées fait ses preuves

Chez les patients atteints de CBNPC avec mutation de l’EGFR (epidermal growth factor receptor), le dacomitinib, inhibiteur de tyrosine kinase (ITK) de l’EGFR de seconde génération, a démontré son efficacité en 1re ligne métastatique par rapport au gefitinib (ITK de l’EGFR de première génération) dans l’étude de phase III ARCHER 1050 (3). En effet, chez 452 patients atteints d’un CBNPC de stade IIIB/IV nouvellement diagnostiqué et EGFR positif, le dacomitinib prolongeait la SSP de plus de 5 mois : 14,7 mois sous dacomitinib versus 9,2 mois avec le gefitinib (p < 0,0001). À 24 mois, le taux de SSP s’élevait à 30,6 % des patients avec le dacomitinib versus 9,6 % dans le groupe gefitinib, soit une réduction du risque de progression de 41 %.

Dans l’étude de phase III ALEX (4), 303 patients présentant un CBNPC localement avancé ou métastatique avec mutation ALK recevaient en première ligne de traitement métastatique soit l’alectinib, soit le crizotinib. Les résultats montraient une réduction du risque de progression de 53 % avec l’alectinib, par rapport au crizotinib. Selon des experts indépendants, l’alectinib allongeait la SSP de 15 mois environ : 25,7 mois de SSP médiane sous alectinib versus 10,4 mois sous crizotinib.

Ainsi, que ce soit en cas de mutation de l’EGFR ou de mutation ALK, la dernière génération de thérapies ciblées apporte toujours plus de bénéfices en termes de SSP. 

Et les patients âgés ?

« Dans les pays industrialisés, environ 40 % des nouveaux cas de cancers se déclarent chez des sujets de plus de 70 ans. Pourtant, les patients âgés sont moins souvent inclus dans des essais cliniques et on a peu de données sur eux », précise le Pr Christos Chouaid. Cette année à l’ASCO, une session consacrée aux personnes âgées a permis de rappeler les enjeux de leur prise en charge. En effet, « elles ont des comorbidités (insuffisance cardiaque, rénale, respiratoire), un environnement social fragile, des troubles cognitifs et sont davantage concernées par les interactions médicamenteuses car elles sont polymédiquées ».

D’ailleurs, « l’année dernière, le Dr Romain Corre de Rennes a présenté l’essai Esogia (5) qui montrait qu’une évaluation gériatrique aiguë n’amenait pas plus de bénéfice en termes d’efficacité mais en revanche réduisait les effets secondaires ». Ainsi, si des progrès sont encore à faire dans la prise en charge des sujets âgés, il persiste cependant « la difficulté de financer des essais sur les personnes âgées en l’absence de nouvelles molécules à tester, tant au niveau industriel qu’académique ».

D’après un entretien avec le Pr Christos Chouaid (CHI de Créteil)
(1) Brahmer J et al, ASCO 2017 Abstract 9000
(2) Papadimitrakopoulo V et al, ASCO 2017 Abstract 9094
(3) Mok T et al, ASCO 2017 Abstract LBA9007
(4) Tsang Shaw A et al, ASCO 2017 Abstract LBA9008
(5) Corre R et al ; Use of a Comprehensive Geriatric Assessment for the Management of Elderly Patients With Advanced Non-Small-Cell Lung Cancer : The Phase III Randomized ESOGIA-GFPC-GECP 08-02 Study ; J Clin Oncol. 2016 May 1 ; 34 (13) : 1476-83.

Karelle Goutorbe

Source : lequotidiendumedecin.fr