CINEMA
« J 'AI toujours aimé les lieux hors du temps, hors de la vie quotidienne, le music-hall, le cirque... Une fête foraine c'est une planète Mars itinérante », explique Patrice Leconte. Dans ce film dont il a écrit le scénario et les dialogues avec Claude Klotz (auteur de nombreux romans policiers, entre autres), il va donc associer un forain qui tient un manège d'autos tamponneuses et une fille « qui semble parachutée de je ne sais quelle autre planète, justement... ».
Elle s'appelle Lola, du moins c'est ce qu'elle dit, et elle paraît bien triste au volant de son auto tampon, alors que tous les autres s'amusent sans complexes. Alors Félix, on s'en doutait à la seule vue du titre, va tomber amoureux d'elle. Et, bien sûr, puisqu'il faut qu'il y ait une histoire et que Leconte aime filmer des couples improbables, cela ne va pas être simple.
L'intrigue semble mince, même si on y ajoute un chanteur de dancing sur les traces de Lola et un curieux personnage qui ne cesse de refaire des tours sur le manège. Mais tout est dans le mystère dont Leconte entoure son héroïne, ses fuites et ses retours jamais expliqués (sauf à la fin), ses impulsions incompréhensibles, ses sourires miraculeux sur fond de désespoir inextinguible.
Félix, si à l'aise dans ce monde de forains décrit ici comme chaleureux et fraternel (le meilleur des mondes...), en est d'autant plus obsédé, comme l'était le lanceur de couteaux Daniel Auteuil face à Vanessa Paradis dans « la Fille sur le pont ». Le cinéaste mêle avec habileté la joie simple et colorée de la fête foraine et les angoisses sous ciel sombre de ces amours difficiles ; il joue des lumières et des ombres mais aussi, avec virtuosité, des bruits et des musiques. Et on entre avec facilité dans cet univers effectivement hors du temps.
Les acteurs aussi se sont fondus dans ce décor particulier. Alain Bashung, dont la chanson « Dehors » a été l'une des sources d'inspiration de Leconte, rend son deuxième homme aussi ambigu que nécessaire. Philippe Torreton est, comme toujours, solide, puissant, tandis que Charlotte Gainsbourg compose parfaitement ce personnage en manque, en creux contre lequel l'amour bute, rebondit.
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