L ES Américains appellent cela un « hoax », c'est-à-dire un canular. Il en circule un bon nombre sur Internet, la plupart de ces fausses nouvelles naissant aux Etats-Unis. Qui n'a pas entendu parler de la bactérie tueuse contenue dans un lot de bananes en provenance du Costa-Rica ou encore des antisudorifiques qui seraient responsables du cancer du sein ? Ce ne sont que des légendes, mais elles ont de quoi affoler des millions d'internautes.
Depuis la fin de la semaine dernière, une information de ce type, massivement diffusée par e-mail, sème la panique dans les foyers français. Des personnes auraient été infectées par le VIH dans des cinémas de la région parisienne par le biais d'aiguilles plantées par malveillance dans les sièges.
« Ça s'est passé à Paris. Il y a quelques semaines de cela, dans un cinéma. Une personne s'est assise sur quelque chose de piquant. Lorsqu'elle s'est relevée pour voir de quoi il s'agissait, elle a trouvée une aiguille plantée, à travers le siège, avec une note disant : " Vous venez d'être infecté par le VIH " . Le centre de contrôle des maladies rapporte plusieurs événements similaires dans plusieurs autres villes. Toutes les aiguilles testées sont positives au VIH », explique le message naviguant sur le Net, recommandant par ailleurs de communiquer cette information à des proches.
Le texte du courrier électronique précise que « la police municipale d'Issy-les-Moulineaux » a été chargée de diffuser la nouvelle « à tous les départements d'Ile-de-France ». « Le Quotidien » a reçu ce message de l'Institut Pasteur, dont l'un des membres reconnaît s'être « fait avoir » comme beaucoup d'autres internautes. Submergé d'appels téléphoniques, l'intéressé explique, par boîte vocale interposée, qu'il a fait circuler cette information « de bonne foi ». Renseignements pris auprès de la mairie d'Issy-les-Moulineaux, il demande que le canular soit dénoncé pour mettre fin à la rumeur.
La mairie d'Issy venait de démentir l'information. « Il s'agit, selon elle, d'un canular de mauvais esprit ». Elle note qu'il « n'y a pas de police municipale à Issy-les-Moulineaux ». Pas plus que de « centre de contrôle des maladies » en France. Il s'agit d'une traduction hasardeuse de Center for Diseases Control, organisme bien connu aux Etats-Unis.
Aux Etats-Unis et au Canada
Une histoire similaire, mettant en scène des spectateurs dans un cinéma, a circulé auparavant à Montréal, ainsi qu'à Atlanta. En fait, le canular a d'abord traversé Dallas en juin 2000, puis Denver, avant d'atteindre la Virginie. Au Canada, la « légende urbaine » a pris des forces, la Gendarmerie royale canadienne (GRC), le corps de la police le plus respecté du pays, ayant, dans un premier temps, apporté sa caution au message. « Ce n'est pas la première fois que la peur panique et incontrôlable qu'inspire le SIDA sert de support à un hoax », lit-on sur hoaxbuster.com, le site de trois internautes français, « destructeur de canulars ». En pratique, les hoaxes prennent toutes sortes de formes : fausses alertes aux virus, fausses chaînes de solidarité, fausses promesses, fausses informations, etc. Quelle qu'en soit la forme, hoaxbuster.com les débusque, les répertorie, en déjoue les tours. Bien avant cette histoire, « des affabulations identiques circulaient déjà depuis des années », apprend-on sur le site. Ainsi, des aiguilles infectées par le VIH auraient été trouvées dans les parcs pour enfants, dans les manèges à balles de la restauration rapide ou de grands magasins d'ameublement, dans les cabines téléphoniques, etc. Dans les années quatre-vingt, une autre « légende urbaine » avait fait le tour du monde. Celle de Mary, séropositive, qui après une nuit partagée avec un compagnon de passage, avait disparu au petit matin, laissant pour seul message d'adieu à son partenaire : « Bienvenue dans le monde du SIDA ». Selon la rumeur, les mots étaient inscrits au rouge à lèvres rouge sur la glace de la salle de bain.
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