CONGRES HEBDO
« C HEZ le petit enfant, tous les facteurs sont réunis pour favoriser l'inhalation de corps étrangers (CE), explique le Pr J.-M. Triglia, l'enfant a tendance à porter tous les objets à la bouche à la période de la diversification alimentaire, avec acquisition de dents tranchantes vers l'âge de 6 mois contrastant avec l'absence de dents masticatrices, ce qui favorise l'éclatement du corps étranger. La coordination motrice est absente à cet âge-là et facilite l'inhalation lors d'un phénomène d'inspiration sous l'effet d'un choc ou de la surprise. »
Par ailleurs, anatomiquement, le rétrécissement naturel des voies aériennes contraste avec la présence d'un tissu conjonctif lâche et une compliance augmentée des parois bronchiques qui favorisent le collapsus expiratoire ; de plus, l'importance des glandes muqueuses augmente les phénomènes d'hypersécrétion et la réaction inflammatoire locale.
Des corps étrangers organiques quatre fois sur cinq
Dans 21 % des cas, il s'agit d'un CE inerte, en métal ou en plastique. Il est en général unique et bien toléré au départ. Les CE organiques sont retrouvés, quant à eux, dans 79 % des cas ; le plus souvent multiples, ils entraînent une réaction inflammatoire d'emblée majeure (« Peanuts Syndrome » ou « Vegetable Bronchitis »). Cette réaction granulomateuse oblige dans certains cas à différer l'extraction endoscopique et à instaurer dans l'intervalle un traitement médicamenteux anti-inflammatoire. Selon les pays et les habitudes alimentaires, on retrouve plus particulièrement des cacahuètes, des grains de raisin, des fèves, des graines de pastèque, etc.
Les signes d'appel sont loin d'être toujours présents. L'accès brutal de suffocation associant toux explosive, tirage et cyanose est rapporté dans 60 à 99 % des cas, mais il n'amène à consulter en urgence que dans 30 % des cas ; il est retrouvé rétrospectivement dans 10 % des cas.
Bien souvent, ce sont des complications qui constituent les premiers signes d'appel : une toux irritative (60 % des cas), une dyspnée (50 % des cas), de la fièvre (35 % des cas), une bronchopneumopathie (18 %) et des complications à type d'emphysème sous-cutané cervico-thoracique ou une détresse respiratoire (10 %).
La symptomatologie varie selon la localisation finale du corps étranger. « Les CE laryngés et trachéaux représentent 10 % des cas et se traduisent par un tableau de laryngite ou trachéite aiguë, mais le diagnostic est souvent tardif (jusqu'à six à six mois plus tard). Le risque d'asphyxie aiguë est majeur par enclavement. Il est capital, souligne le spécialiste , de faire au moindre doute une fibroscopie simple nasopharyngienne (nasofibroscopie) éventuellement complétée d'un cliché thoracique. Les CE sont bronchiques dans 90 % des cas, plus souvent retrouvés dans la bronche droite, qui se trouve chez l'enfant davantage dans l'axe de la trachée, l'asymétrie auscultatoire est donc particulièrement évocatrice et doit toujours être recherchée. »
Une fois sur cinq, il n'y a aucun signe d'appel au départ. La radio thoracique réalisée dans de bonnes conditions visualise le corps étranger dans 5 % des cas, avec la présence de signes radiologiques indirects (emphysème, atélectasie, épanchement gazeux, abcès pulmonaire bien localisé chez un enfant sans antécédent pulmonaire particulier). Néanmoins, dans 25 % des cas, le cliché thoracique est normal.
Au total, les arguments diagnostiques qui amènent à réaliser une bronchoscopie ne sont pas toujours nombreux : comme le précise le Pr Triglia, la triade complète (syndrome de pénétration, corps étranger visualisé à la radio et complications respiratoires) n'est retrouvée que dans 30 % des cas, deux paramètres sur trois dans 42 % des cas et un seul signe d'appel dans 14 % des cas. Ce qui signifie que chez plus de un enfant sur dix, il n'y a aucun signe d'appel ! Et explique en partie la variabilité des délais d'extraction (cf. tableau) par trachéobronchoscopie, qui, réalisée par un opérateur expérimenté dans le cadre d'une structure spécialisée, permet d'extraire le CE à la première tentative dans 95 % des cas.
D'après la communication du Pr J.-M. Triglia, hôpital La Timone (Marseille).
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