Maintenir ou supprimer la clause spécifique à l'interruption volontaire de grossesse (IVG), la question divise les protagonistes depuis plusieurs années. Le débat est revenu sur le devant de la scène en septembre après les propos du Dr Bertrand de Rochambeau, président du Syndicat national des gynécologues et obstétriciens de France (SYNGOF).
Interviewé le 11 septembre par une journaliste de l'émission Quotidien qui déclarait « ce n'est pas un homicide de faire une IVG », le gynécologue avait objecté que « si » puis ajouté que « la loi (le) protège » s'il ne veut pas réaliser cet acte médical.
Un acte pas comme les autres
L'accès à l'IVG, parfois difficile selon les situations territoriales, ne semble pas entravé dans son ensemble d'après la récente étude de la Drees, avec un chiffre stable depuis plus de 15 ans. En revanche, la clause de conscience spécifique à l'IVG est vivement critiquée. Ainsi, le 28 septembre, journée mondiale pour le droit à l'avortement, une proposition de loi a été déposée par la sénatrice Laurence Rossignol et 71 autres élus socialistes pour la supprimer, arguant qu'il s'agit d'« un doublon dont la seule finalité est de culpabiliser les femmes ».
La clause de conscience spécifique à l'IVG, inscrite dans la loi Veil de 1975, est remise en cause depuis 2013 par le Haut conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes (HCE) et plus largement par les féministes, au motif qu'elle serait stigmatisante pour les femmes. Pour les partisans de la suppression, cela ne changerait rien pour les médecins : le code de déontologie (article 47) prévoit déjà que tout médecin peut refuser des soins, sauf urgence, à condition de réorienter le patient.
Mais l'Ordre des médecins ne l'entend pas de cette oreille. Considérant que la grossesse n'est pas une pathologie et que donc l'IVG n'est pas un acte comme un autre, l'instance ordinale affirme que le maintien dans la loi se justifie. Cette position semble refléter celle des médecins sur le terrain. Dans une enquête réalisée par le « Quotidien » auprès de ses lecteurs, les médecins se sont prononcés à 77,6 % en faveur du maintien de la clause.
Une clause redondante
Mais tous les médecins ne partagent pas cet avis. Le Collège national des gynécologues obstétriciens (CNGOF) se démarque ainsi en estimant que la clause de conscience est superflue. « Je ne vois pas l'intérêt de dire les choses deux fois », avait déclaré au « Quotidien » le Pr Israël Nisand. Pour autant, le président du CNGOF ne s'est pas prononcé en faveur d'une suppression « qui braquerait tout le monde », avait-il justifié.
D'autres sont plus engagés. Pour le Dr Gilles Lazimi, généraliste membre du HCE, la loi, qui a été mise en place « pour contrecarrer les réticences des médecins de l'époque », a fait son temps. C'est ce que laisse aussi à penser une enquête réalisée en 2014 chez 420 internes. Les jeunes gynécologues considèraient dans leur ensemble que l'IVG est un acte comme un autre, « qui fait partie du job », avait commenté le Dr Solène Vigouroux, aujourd'hui chef de clinique à l'hôpital Bicêtre et auteure de l'étude, avant d'ajouter « car cela fait partie de la vie des femmes ».
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