La parodontite : une affection aux conséquences générales méconnues

Publié le 13/02/2001
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L ES maladies parodontales sont des maladies infectieuses à site, elles augmentent avec l'âge et sont favorisées par une mauvaise hygiène buccale. Elles touchent entre 10 et 30 % de la population. Il s'agit de parodontite chronique dans 4 cas sur 5.

Chez 80 % des patients, la parodontite est détectée à partir de 40 ans par une lésion osseuse de 2 à 3 mm, avec une progression de 0,5 mm par an avec des phases de rémission. Les lésions se développent soit lentement sur tout ou partie de la dentition, soit plus ou moins rapidement autour de certaines dents.
Depuis les années quatre-vingt-dix, on sait que la parodontite est multifactorielle : 20 % des facteurs sont bactériens et les autres sont environnementaux, génétiques et locaux (prise de médicaments). La maladie doit être évaluée cliniquement ainsi que tous les facteurs associés : inflammation, taux de la plaque dentaire et facteurs locaux. L'impact de la plaque sur la parodontite dépend du type de bactéries qu'elle comporte, certaines sont très pathogènes pour le parodonte et d'autres neutres. Une réponse défavorable au stress et des antécédents de gingivite ulcéro-nécrotique témoignant d'un déficit immunitaire sont des facteurs prédisposants. Alors qu'à l'inverse une susceptibilité à la carie pourrait constituer une protection contre la parodontite (antagonisme bactérien).

Facteurs de risque de différentes pathologies

Les maladies parodontales (MP) sont des facteurs de risque de différentes pathologies générales. Leur impact dépend du stade évolutif de la pathologie gingivale qui se présente sous deux formes : la gingivite, qui est une inflammation sans perte d'attache, et la parodontite au cours de laquelle il y a perte d'attache et atteinte osseuse.
Au stade de l'inflammation de la gencive, les globules blancs constituent une barrière de défense bactérienne, puis, si l'inflammation n'est pas traitée lors de la rupture de la liaison gencive-dent, il se produit une cascade d'événements avec libération de toxines bactériennes qui vont entraîner la nécrose de l'os.
Une bactériémie peut survenir et causer une pathologie infectieuse générale. Ainsi, les MP sont des facteurs de risque de pneumopathies, notamment chez les fumeurs et en cas de déficit immunitaire. Elles augmentent aussi la fréquence des endocardites infectieuses, affection rare (50 pour un million).

Chez les patients atteints d'infarctus

L'impact des MP sur les affections cardio-vasculaires est également démontré. Au cours d'études finlandaises, il a été observé une mauvaise hygiène dentaire chez les patients atteints d'infarctus du myocarde, alors que les corrélations avec l'hypercholestérolémie et l'HTA étaient faibles dans cette série (100 patients). Il existe une corrélation positive significative entre l'absence de dents et la maladie coronarienne. Deux études importantes montrent que la présence de poches parodontales supérieures à 3 mm double le risque d'événement coronarien. Chez 214 hommes de 25 à 49 ans, la MP augmente de 75 % le risque de maladie coronaire. Chez ces patients suivis pendant sept ans, il est possible de donner des facteurs de prévisibilité de maladie coronaire.
Il y a aussi des interrelations entre maladie parodontale et diabète. En premier lieu, en cas de diabète non équilibré, de type I ou II, le risque de parodontite est élevé. En outre, chez un diabétique mal équilibré, la présence d'une parodontite est aussi un facteur de risque d'aggravation du diabète. En effet, certaines bactéries des parodontites sont susceptibles de bloquer les récepteurs de l'insuline et d'aggraver le diabète ou de rendre l'équilibre glycémique plus difficile.

Un poids de naissance inférieur à 2,5 kg

Enfin, la parodontite est un facteur de risque de prématurité et d'hypotrophie fœtale, avec un poids de naissance inférieur à 2,5 kg. Sur 40 000 naissances suivies dans un hôpital londonien, le risque de prématurité et de faible poids de naissance est multiplié par 3 en cas de maladie parodontale non traitée. Un germe anaérobie de la plaque supragingivale (Bactéroïdes) peut infecter le tractus uro-génital de la mère et avoir un effet délétère sur le développement fœtal, comme les médiateurs de l'inflammation libérés au cours de la parodontite et passant dans le liquide amniotique.
Le traitement doit prendre en compte les facteurs locaux et envisager un traitement étiologique en fonction des facteurs de l'hôte : microbiologiques (tests) et environnementaux (histoire personnelle), et assurer la maintenance du traitement. L'hygiène dentaire joue un rôle primordial dans le traitement. Le pronostic à long terme est fonction de la colonisation bactérienne, de la qualité du contrôle de la plaque et de la présence du tabagisme.

D'après une communication au Forum Santé Aquitaine du Dr F. Mora, secrétaire général de la Société française de parodontologie.

Expliquer le lien avec la maladie coronaire

Deux hypothèses sont proposées pour expliquer le lien physiopathologique entre parodontite et coronaropathies :
• la parodontite est une maladie infectieuse qui libère dans la circulation générale des germes anaérobies et entraîne une bactériémie avec Porphyromonas gingivalis et Streptomonas sanguis qui ont une forte affinité pour les plaquettes et favorisent leur agrégation et la formation de thrombus ;
• la deuxième hypothèse s'appuie sur le relargage de cellules inflammatoires dans la circulation et de libération accrue d'IL 1 et TNF-alpha qui sont des facteurs de nécrose favorisant la formation de plaque athéromateuse.

Dr Michèle FAUSSIER

Source : lequotidiendumedecin.fr: 6856