Municipales 2001
A XEES sur les questions d'insécurité, de logement social, de circulation urbaine, de fiscalité locale, prenant l'allure de réquisitoires ou de plaidoyers à l'encontre ou en faveur des équipes sortantes, marquées, parfois, par les rancurs ressassées et les haines recuites, revêtant, à Paris, Lyon et Toulouse, notamment l'allure de tests nationaux au point que l'on a pu parler de premier tour des législatives et de la présidentielle de l'an prochain, la campagne pour les municipales à laissé au bord de la route les problèmes de santé et, ipso facto, ceux du corps médical.
Il y a bien eu, ici et là, quelques mobilisations en faveur d'un hôpital menacé de fermeture, quelques interpellations obligées de candidats par des médecins, notamment sur les problèmes de la permanence de soins, quelques réunions en petits comités entre les têtes de liste et le corps médical, quelques engagements sur la politique hospitalière ou la création de conseils d'arrondissement de santé. Mais cela ne fut que préoccupations accessoires ou exercices de style contraints. Les candidats - fussent-ils médecin de profession - savent bien que les questions de santé, sauf dans de rares municipalités, n'interviendront guère dans le choix des électeurs.
Prérogatives limitées
Comment pourrait-il en être autrement ? D'abord, la santé échappe à la compétence des maires. Ils sont, dira-t-on, présidents des conseils d'administration des hôpitaux, du moins pour ceux d'entre eux qui ont un établissement hospitalier dans leur commune. Soit. Mais l'on sait bien que face à la politique hospitalière et aux budgets déterminés par le gouvernement, face aux pouvoirs des agences régionales d'hospitalisation, chargées de la mise en uvre de ces orientations et de répartition de la manne financière, le pouvoir des maires est réduit à la portion congrue. Leur seule ressource en la matière est d'user de leur influence politique pour tenter de faire annuler des décisions qui leur seraient défavorables. Ou de défiler la poitrine ceinte de leur écharpe tricolore en tête de cortèges populaires derrière des calicots proclamant « nous voulons accoucher au pays » ou « nous voulons garder notre hôpital ». Ils ont pu à un moment donné, dans certaines villes, perturber les opérations de restructurations hospitalières. Mais ils n'ont pu globalement leur faire barrage. Jean-Claude Gaudin peut bien se prononcer en faveur de la création d'un nouvel hôpital à Marseille, il sait bien que la décision lui échappera. Bertrand Delanoë et Philippe Séguin peuvent bien jurer leurs grands dieux qu'ils ne seront pas des présidents potiches de l'AP-HP, ils savent bien que, en fin de compte, c'est l'Etat qui tranchera. Leur pouvoir est d'influence, il n'est pas de compétence. Et leur influence dans ce domaine semble s'être réduite. Les contraintes financières étant ce qu'elles sont, le temps n'est plus où les maires sortants venaient assurer leur réélection en quémandant dans le bureau du ministre - et souvent en obtenant - la construction d'un hôpital ou l'installation d'un scanner. Ce type de démarche peut, certes, encore exister, mais le succès de l'opération est plus aléatoire.
Quelques initiatives
Pour le reste, les compétences du maire en matière de santé sont indirectes : elles ont trait à l'eau potable, à l'hygiène en milieu scolaire, à la désinfection en cas d'épidémie ou d'épizootie.
Bien qu'ils sachent leurs prérogatives limitées, certains élus prennent quelques timides initiatives en matière de santé. C'est le cas de ceux qui, à Lyon, à Rennes, au Havre ou ailleurs envisagent de créer des maisons de santé ouvertes aux praticiens libéraux afin de mieux organiser la permanence des soins. Mais il s'agit là d'initiatives limitées qui ne doivent pas faire oublier que parallèlement de très nombreux centres de santé municipaux, pratiquant le tiers payant, créés après-guerre par des municipalités, notamment de gauche, ont fermé leurs portes. Il ne resterait plus que 150 de ces structures qui étaient souvent très déficitaires et dont l'utilité sociale est aujourd'hui moins flagrante, compte tenu de la mise en place de la CMU.
Zones rurales : l'exode médical
Dans les communes rurales, les maires risquent d'être assez rapidement confrontés à un autre problème : celui de la diminution du nombre de généralistes. Les difficultés de l'exercice en milieu rural (isolement, obligation de participer plus fréquemment aux gardes) dissuadent de nombreux médecins d'ouvrir, ou de reprendre, un cabinet dans une petite commune. Dans les zones rurales, la densité de généralistes est presque trois fois inférieure à celle des villes de plus de 200 000 habitants. Et cela alors que la population dans les campagnes est plus âgée que la moyenne nationale et a plus fréquemment besoin d'un généraliste. Les responsables syndicaux de la profession reconnaissent qu'il est de plus en plus difficile de trouver un jeune praticien pour prendre la succession d'un médecin de campagne qui part à la retraite. Les maires savent bien que, avec l'école et la pharmacie, le généraliste fait la trame du tissu rural. Que ces éléments disparaissent, et c'est la lente agonie du village qui commence. Dans ces conditions, les élus des bourgs vont devoir se transformer en sergents recruteurs. Et s'ils veulent attirer à eux le jeune généraliste, il leur faudra user d'arguments convaincants et proposer des avantages matériels (en termes de locaux, notamment).
Pour des milliers de maires de petites communes, ce combat s'annonce délicat. Tout comme s'annonce difficile celui des maires des villes comprenant des quartiers défavorisés.
Car la aussi, comme au Val-Fourré (Mantes-la-Jolie), les médecins sont tentés de déserter des zones où leur sécurité, à leur cabinet, et plus encore lorsqu'ils font des visites, n'est plus assurée.
Pas de lobbying médical
La santé n'étant pas un enjeu majeur pour les municipales, comment s'étonner que le corps médical n'ait que très marginalement mis à profit ce scrutin pour tenter de faire entendre sa voix ? D'ordinaire prompt et habile à user des réseaux d'influence politique et à faire du lobbying, les organisations professionnelles ont, cette fois-ci, déserté le champ de bataille électoral. La journée d'action organisée aujourd'hui par le Centre national des professions de santé pour protester contre la politique de santé du gouvernement - et dont la date avait été choisie a dessein trois jours avant le premier tour - relève du service minimum syndical. Les responsables de syndicats médicaux qui avaient juré, avec une mâle assurance, à l'automne dernier, qu'ils allaient « gâcher la campagne de Martine Aubry à Lille » même après que cette dernière eut quitté le gouvernement, ont rengainé leurs menaces.
Il est vrai, comme le fait remarquer le Dr Cabrera, président du Syndicat des médecins libéraux, que cela aurait été confondre l'acharnement contre une personnalité avec la contestation d'une politique. Même Elisabeth Guigou n'a pas eu à se plaindre, jusqu'à présent, du comportement des praticiens libéraux qui n'ont guère troublé le déroulement de sa campagne électorale. Les infirmières spécialisées, en lutte pour de meilleures rémunérations, n'ont pas eu de telles préventions qui, a plusieurs reprises, ont perturbé la campagne avignonnaise de la ministre de l'Emploi et de la Solidarité. Les médecins attendent, eux, la campagne de la présidentielle et des législatives pour user de leur influence -qui a souvent fait trembler la droite et parfois la gauche. Même si, contrairement à ce qui est parfois affirmé, elle n'a jamais eu un impact déterminant.
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