Il existe une symptomatologie psychiatrique

La souffrance psychique dans l’Alzheimer

Publié le 03/02/2010
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Pulsion de vie

La démence en général et la maladie d’Alzheimer (MA) en particulier sont des pathologies des contraintes : troubles mnésiques, manque du mot, difficultés exécutives… Elle entraîne une perte de l’usage de la mémoire, de la parole, des gestes des acquis. Malgré ces disparitions progressives, les sujets atteints de la MA continuent d’être animés par une pulsion de vie, de ressentir des émotions et d’exprimer des sentiments. Il en résulte une souffrance quasi inhérente à la maladie qui touche dans des registres différents les proches et le sujet lui-même. Depuis les années 1990, période où seuls étaient retenus les signes neurologiques comme critères diagnostiques, l’attention s’est portée sur cette symptomatologie psychiatrique. Certains auteurs en parlent d’ailleurs comme d’un deuxième groupe de symptômes faisant partie intégrante de la MA (Burns, 2009). Compte tenu de la fréquence des troubles de l’humeur se manifestant au cours de l’évolution de la MA et de leurs effets sur le pronostic (aggravation du déficit cognitif, participation à la perte d’autonomie, augmentation du risque de mortalité), il est primordial de les détecter et de les soigner rapidement.

Trouble dépressif

Chercher les signes de trouble dépressif.

À côté de l’apathie et des problèmes d’agitation et d’agressivité, les symptômes dépressifs font partie des signes comportementaux et psychiques de la démence les plus fréquents rencontrés dans l’évolution de la MA. De 30 à 50 % des individus atteints de MA ont un ou des symptômes dépressifs (Zubenko, 2003). Le diagnostic de dépression est difficile à affirmer. L’Institut National de Santé Mentale des États-Unis (NINH) a proposé des critères standardisés provisoires, dérivés de ceux du DSM IV pour les épisodes dépressifs avec quelques modifications : quantitatives (il faut 3 symptômes au moins et non 5, sans qu’ils soient nécessairement présents tous les jours) et qualitatives (l’item « perte de plaisir au contact social » remplace celui de « perte d’intérêt » et il a été ajouté d’autres signes comme l’irritabilité, la tendance au repli sur soi et l’isolement social).

Risque suicidaire

Concernant le risque suicidaire dans la MA, un passage à l’acte est tout à fait possible, même si sa prévalence est faible (- de 1 %). Les sujets Alzheimer qui ont effectué une tentative de suicide représenteraient entre 6 et 7 % des admissions en service de psycho-gériatrie. Outre une symptomatologie dépressive, il est souvent retrouvé des idées délirantes de persécution.

La décision d’une prise en charge médicamenteuse repose sur les arguments cliniques, le degré d’inconfort ainsi que sur les répercussions sur la qualité de vie. Le choix de l’antidépresseur privilégie les ISRS (inhibiteur de la sérotonine). L’ECT (électroconvulsivothérapie) peut être utile dans certaines indications (sévérité de la dépression, contre-indication aux anti-dépresseurs, résistance aux anti-dépresseurs) mais il y a un risque important de confusion et une suspicion d’aggravation cognitive. Les thérapies non médicamenteuses à médiation corporelle peuvent compléter utilement cette prise en charge.

D’après la communication du Dr Clément Pinquier (service du Pr Pellerin, hôpital Charles-Foix, Ivry-sur-Seine) lors des 8es Journées « Troubles Mentaux, Vieillissement et Démence », organisées par le Centre hospitalier Sainte-Anne en partenariat avec l’Association Française de Psychiatrie Biologique et la Société de Psychogériatrie de Langue Française.

 Dr BRIGITTE VALLOIS

Source : Le Quotidien du Médecin: 8700