Dépression

L’anhédonie, symptôme central et très handicapant

Publié le 13/03/2012
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DANS LE CADRE d’un symposium du Congrès de l’Encéphale (1), le Dr David Gourion a mis l’accent sur l’importance de l’anhédonie dans la dépression. En effet, ce symptôme central et spécifique est très handicapant pour le patient, ce qui justifie une prise en charge rapide et adaptée, ce qui impose une démarche diagnostique rigoureuse.

Dans tous les traités de psychiatrie, l’anhédonie figure comme symptôme cardinal de la dépression mais au cours des dernières années on a peut-être eu tendance à délaisser son analyse sémiologique au profit de symptômes plus « voyants » tels que la tristesse, la perte d’estime de soi, les idées noires, le risque suicidaire… « Il est bon de remettre l’anhédonie en tant que dimension émotionnelle au cœur de la dépression car cette perte du goût de la vie est l’un des symptômes les plus spécifiques et parce qu’elle explique en aval bien d’autres manifestations de la maladie comme la perte d’énergie, d’appétit, comme l’altération des relations sociales, familiales, sexuelles. Pour toutes ces raisons, l’anhédonie handicape gravement les déprimés et on doit chercher à la faire régresser aussi rapidement que possible, sous traitement. »

Or les traitements les plus utilisés, par inhibiteurs de recapture de la sérotonine, peuvent parfois induire, quand ils sont utilisés à fortes doses, une apathie qui, bien que distincte de l’anhédonie dépressive, peut revêtir un aspect clinique très proche. Si bien que quand on est confronté à une apathie induite avec abrasion des affects (proche de l’anhédonie), la solution n’est pas d’augmenter les posologies de sérotoninergiques purs mais plutôt de se tourner vers des antidépresseurs ayant des mécanismes d’action différents (antidépresseurs bi- ou tri- aminergiques, IMAO, médicaments d’autres classes tels que la mirtazapine ou l’agomélatine…).

Au total, l’anhédonie mérite toute l’attention du clinicien chez le patient déprimé car cette composante émotionnelle spécifique nécessite une prise en charge rapide et adaptée, ce qui impose de distinguer l’anhédonie dépressive vraie de cet éventuel effet indésirable du traitement.

(1) Symposium organisé avec le soutien des Laboratoires Servier.

 Dr ALAIN MARIÉ

Source : Le Quotidien du Médecin: 9097