De notre correspondant
C OLLECTER les données concernant les maladies épidémiques émergentes, coordonner les stratégies internationales, fixer les normes mondiales, telles sont les trois missions du département de surveillance des maladies transmissibles de l'OMS, placé à Genève sous la responsabilité du Dr David Heymann. Il travaille en liaison avec les quelque 170 centres collaborateurs de l'organisation répartis dans le monde.
La nouvelle antenne, inaugurée hier à Lyon et dirigée depuis quelques jours par le Dr Diego Buriot (voir encadré), va surtout remplir une mission de moyen terme : améliorer par la formation les ressources intellectuelles des pays les plus touchés, souvent parmi les plus pauvres : « Renforcer la sécurité sanitaire en permettant aux pays en développement de renforcer leurs capacités pour faire face aux infections émergentes, y compris le dépistage de la pharmaco-résistance », selon l'expression du Dr Gro Harlem Brundtland, directeur général de l'OMS, qui rappelle que les maladies transmissibles ont entraîné le décès de 13 millions de personnes en 1998.
Dès avril, une première promotion de stagiaires - une trentaine de spécialistes de laboratoires venus d'Afrique et d'Asie -, est attendue à Lyon. Elle planchera sur des pathologies qui font des ravages dans le monde entier, choléra, méningites, fièvre jaune et hépatites, et sur deux types de fièvres hémorragiques, Ebola et Marburg, circonscrites au continent africain.
Au-delà de cette mission initiale de formation, l'OMS et son bureau lyonnais visent un deuxième objectif ambitieux : constituer progressivement, grâce aux liens personnels tissés à Lyon et aux dernières technologies informatiques appliquées à la santé, un réseau mondial d'échange d'informations, c'est-à-dire un maillage destiné à surveiller, identifier, prévenir et combattre sur place, le plus vite possible, tout risque épidémique.
Dernière caractéristique enfin de cette nouvelle structure de lutte contre les infections : renforcer la présence européenne dans le combat contre les maladies émergentes, un terrain sur lequel, jusqu'à présent, les Américains exercent une domination intellectuelle et matérielle indéniable.
Lyon, biocapitale du Sud
Entre la naissance du projet et l'installation proprement dite des équipes de l'OMS dans le quartier scientifique de Gerland, il s'est écoulé moins de deux ans, délai record. Or, cette localisation à Lyon, liée à la combinaison de plusieurs facteurs favorables, ne doit rien au hasard. Outre la proximité de Genève, siège de l'OMS, c'est d'abord l'action de deux personnalités, Raymond Barre et le Dr Charles Mérieux, qui rêvait d'un Lyon « biocapitale de l'Europe du Sud ». C'est aussi la présence dans l'agglomération lyonnaise d'un tissu cohérent de laboratoires et d'institutions de recherche spécialisés dans les maladies transmissibles émergentes (Centre européen de recherche en virologie, laboratoires INSERM-CNRS, Centre européen de santé humanitaire, laboratoire de haute sécurité P4, école vétérinaire et ses deux laboratoires P2, etc.). Ce sont des liens noués depuis des décennies entre les acteurs lyonnais de recherche et de santé publique (par le biais, notamment, de la fondation Marcel-Mérieux) et la plupart des pays en développement. Sans compter, enfin, qu'entre Lyon et l'Organisation mondiale de la santé, c'est déjà une histoire plus que trentenaire : au milieu des années soixante, le général de Gaulle n'avait-il pas déjà contribué à installer à Lyon le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) ?
Diego Buriot, un pédiatre expert des maladies transmissibles
Le Dr Diego Buriot, directeur du « Bureau de Lyon pour les maladies transmissibles-Surveillance et action » de l'OMS, est pédiatre de formation. Il a été assistant-chef de clinique en pédiatrie à l'hôpital Necker. Avant d'entrer à l'OMS, il a effectué un stage aux Centers for Disease Control and Prevention (CDC) d'Atlanta et obtenu un diplôme de santé publique de l'université d'Harvard. A partir de 1985, il occupe divers postes au sein de l'OMS, qui font de lui un expert des maladies transmissibles, notamment du continent africain. Il est successivement conseiller régional pour les maladies diarrhéiques et les infections respiratoires aiguës au bureau régional de l'Afrique (1985-1988), représentant de l'OMS au Tchad (1989-1991), puis à Abidjan, en Côte d'Ivoire (1991-1994), au Rwanda (1995), dans la région des Grands Lacs (1996), en Irak (1997), enfin au Timor oriental (1999). Depuis un an, il était responsable au siège de l'organisation du bureau de liaison pour l'assistance aux bureaux de l'OMS dans les pays (coopération extérieure et partenariats).
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