Outre que l'affaire a été considérée comme historique tant que la milice Wagner menaçait Vladimir Poutine en personne aux portes de Moscou, le sentiment général, en Occident, est qu'il faut s'attendre dans les jours qui viennent à de nouveaux rebondissements. Poutine, en, effet, a subi une humiliation sans précédent car l'armée russe n'a pas réussi à arrêter ni même à freiner la promenade sans histoire des miliciens. D'une certaine manière, le maître du Kremlin a déjà signé la fin de sa carrière. Sa chute est d'autant plus hallucinante qu'il n'était pas difficile de prévoir l'action de l'atrabilaire chef de Wagner. Prigojine n'en a pas fini avec Poutine, détenteur d'un pouvoir immense mais menacé à la fois par ceux qu'il a osé envahir et ceux qui, près de lui, supputent ses chances de rester au pouvoir.
Rien ne sera donc plus comme avant en Russie, où la fragilité de Poutine vient d'être démontrée par son pire ennemi intérieur, alors qu'il dirige un gouvernement totalitaire. Que son protégé Loukatchenko, un hommes aux idées plus que médiocres, ait assuré la médiation avec Prigojine, est déjà une démission pour le maître du Kremlin, le protégé se hissant soudainement au rôle de protecteur. La capacité de l'armée russe à se battre sur deux fronts, au nord et au sud, est gravement remise en question. L'opportunité est offerte aux Ukrainiens de tenter dès maintenant une percée que, avant le coup d'État, ils semblaient enclins à différer.
En même temps, aucun observateur ne peut ignorer le spectacle invraisemblable auquel s'est livré Prigojine, champion de toutes les audaces et capable de faire pire que Poutine. D'un seul coup, il a réussi à faire basculer l'immense fédération de Russie dans une détresse absolue. On se pose donc la question sur le renoncement du chef de Wagner. Sans doute a-t-il cru exister davantage en se dressant contre Poutine, et a-t-il craint ensuite de n'avoir produit qu'un pétard mouillé. Mais, objectivement, il n'y avait rien, dans la résistance russe telle qu'elle a été déployée autour de Moscou, qu'il ne fût en mesure de balayer rapidement. Tout à coup, il a eu peur de n'être pas à la hauteur de l'événement, insensé, qu'il avait monté de toutes pièces. Cependant, Prigojine n'est pas allé à la bataille sans l'avoir minutieusement préparée. Son intention était bel et bien de déposer Poutine.
Premier bilan favorable à Zelensky
L'épisode restera dans toutes les mémoires et dans l'histoire. Poutine a perdu une grosse fraction de sa toute-puissance : son rêve de reconstitution de l'URSS est anéanti. Malgré la résistance russe aux avancées ukrainiennes, le premier bilan est favorable à Volodymyr Zelensky. La tentative de coup d'État a accéléré l'évolution du front dans le sud, malgré les difficultés immenses auxquelles Kiev est confrontée et la part congrue d'armements sophistiqués que reçoivent les Ukrainiens. On ne serait pas surpris si l'été permettait la lente reconquête du Donbass et de la Crimée. C'est en ces termes qu'il faut raisonner sur l'action de Prigojine et non en la considérant comme un épisode révolu et enterré. Il s'agit en réalité d'un séisme qui a secoué durablement la Fédération de Russie, d'autant qu'il a montré la panique de Poutine, sa peur de mourir, son refus d'entamer une négociation directe avec Prigojine, son choix ridicule d'un médiateur proche de l'imbécilité, toutes choses qui traduisent sa stratégie intellectuelle.
Prigojine n'a pas voulu achever la bête blessée. Ce ne doit être en aucun cas l'attitude de Zelensky et des Occidentaux. Nous avons tous en tête la liste des crimes commis par Poutine et, loin de faire preuve d'indulgence, nous devons aider l'Ukraine à se débarrasser de son bourreau.
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