Traitement de la dépression

Le mode d’action des inhibiteurs de la recapture de la sérotonine se dévoile

Publié le 20/09/2010
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Crédit photo : INSERM

L’EFFICACITÉ des IRS tient au fait que les états dépressifs sont associés à des déficits en sérotonine. Ce neurotransmetteur essentiel est impliqué notamment dans les comportements alimentaires et sexuels, le cycle veille-sommeil, la douleur, l’anxiété et les troubles de l’humeur. En bloquant la recapture de la sérotonine par le transporteur de la sérotonine (SERT) au niveau de la synapse, les IRS ont pour effet d’augmenter le taux de sérotonine.

Les équipes d’Odile Kellermann (Inserm U 747) et de Jean-Marie Delaunay (Inserm U 942), en collaboration avec Hoffmann-LaRoche (Bâle) viennent de caractériser pour la première fois in vitro puis in vivo différentes réactions produites en présence de fluoxétine (Prozac). Les chercheurs ont identifié le rôle-clé d’un microARN dans les mécanismes d’action des antidépresseurs sur le cerveau.

Ce micro-ARN nommé miR-16 contrôle la synthèse du SERT, le transporteur de la sérotonine. Dans les conditions physiologiques normales, SERT est présent dans les neurones à sérotonine. Et l’expression de ce transporteur est réduite au silence par miR-16 dans les neurones à noradrénaline (ce neurotransmetteur étant impliqué dans l’attention, les émotions, le sommeil, le rêve et l’apprentissage).

En réponse à la fluoxétine, les neurones à sérotonine libèrent une molécule-signal qui fait chuter le taux de miR-16, ce qui déverrouille l’expression du transporteur de la sérotonine dans les neurones à noradrénaline.

Ces derniers deviennent ainsi sensibles à la fluoxétine. Ils deviennent mixtes, continuant à produire de la noradrénaline et synthétisant aussi de la sérotonine.

In fine, la quantité de sérotonine libérée est accrue à la fois au niveau des neurones à sérotonine et des neurones à noradrénaline.

Activer une nouvelle source de sérotonine.

Ainsi, « ces travaux dévoilent pour la première fois que les antidépresseurs sont capables d’activer une nouvelle source de sérotonine dans le cerveau », indiquent les chercheurs. « Nos résultats montrent par ailleurs que l’efficacité de la fluoxétine repose sur les propriétés " plastiques " des neurones à noradrénaline, c’est-à-dire sur leur capacité à acquérir les fonctions des neurones à sérotonine. »

Ces chercheurs ont utilisé des cellules souches neuronales. Les liens observés in vitro ont ensuite été confirmés in vivo chez la souris, dans les neurones à sérotonine du raphé et les neurones à noradrénaline du locus coeruleus. Ces résultats ouvrent de nouvelles pistes de recherche pour le traitement des états dépressifs, chacun des acteurs de la chaîne de réactions mobilisée par la fluoxétine constitue une cible pharmacologique potentielle.

Science, 17 septembre 2010, vol. 329, n° 5998.

Dr BÉATRICE VUAILLE

Source : Le Quotidien du Médecin: 8818